L'aumônière écarlate
sur Asmodée au format (353 Ko)
Contient : montaginois (25)(...) - Merci... chuchota le soldat en portant ses lèvres desséchées à l'outre de peau que lui tendait Frédéric. Il se hissa tant bien que mal sur ses coudes et but longuement. LeMontaginoisl'observa quelques instants : il ne devait pas être âgé de plus de dix-huit ou dix-neuf ans. (...)
Une fois désaltéré, le Castillian parut reprendre quelques forces. Il observa les alentours, l'air inquiet, puis dévisagea Frédéric et demanda, cette fois dans unmontaginoispresque sans accent : - Depuis combien de temps les combats ont-ils cessé ? - Je l'ignore. (...)
Etant donné ce que fait votre armée à mon pays, je serais vous, je ne parlerais pas d'infamie. Aidez-moi, plutôt, à me débarrasser de ces vêtements... LeMontaginoisétait tellement sidéré par les propos de son interlocuteur et son aplomb qu'il obtempéra sans réfléchir et se mit en devoir, tant bien que mal, d'aider le soldat à se dévêtir. (...)
Je m'appelle don Lucas Gallegos de Avila de Castillo et, sans vous, je serais probablement soumis à la Question, en ce moment... Il pressa un chiffon imprégné d'une substance brunâtre sur les blessures duMontaginois. Frédéric eut l'impression que des milliers d'aiguilles lui transperçaient la peau mais serra courageusement les dents, papillonnant des yeux pour disperser les larmes de douleur qui lui montaient aux yeux. (...)
Les étoiles disparurent les unes après les autres et l'aube se leva, baignant le ciel d'une lumière pâle et rosée. LeMontaginoisn'avait pas réussi à fermer l'oeil. Trop de pensées se bousculaient dans son crâne : la surprise de découvrir qu'il y avait en Castille une forme de magie, l'étrangeté de sa situation actuelle, l'étonnement de n'éprouver aucun remord à quitter ainsi les rangs de l'armée... Et puis, qui sait ? (...)
- Ils vivent dans un petit village, près de Malaca... Mais... Mais je ne me souviens pas de vous en avoir parlé ! s'écria le garçon. - Eh bien, rétorqua leMontaginoisavec aplomb, il va falloir m'en dire un peu plus car j'ai bien l'intention de vous accompagner là-bas et de vous aider ! (...)
Si nous devons voyager ensemble... - Je n'ai pas dit que j'acceptais ! se récria Lucas. Après tout, vous êtesmontaginois! On ne peut pas faire confiance à votre peuple! Ce sont des tricheurs arrogants, des sorciers et... Le jeune homme s'arrêta brusquement, très rouge. (...)
Lucas allait en tête, attentif au moindre bruit, prenant garde à ne pas marcher trop près des rives boueuses du rio de Dios afin de ne pas laisser de traces. De temps à autre, il se retournait pour attendre leMontaginois, qui, blessé et peu habitué à ce genre de trajet, suivait en claudiquant à quelque distance. (...)
Ils quittèrent les abords du fleuve et s'enfoncèrent tous quatre dans les ténèbres, les deux compagnons au centre, encadrés par les prêtres. Plusieurs fois, leMontaginoisfut obligé de poser une main apaisante sur le bras du Castillian, qui semblait pressé d'en découdre, mais le jeune homme parvint à tempérer ses émotions et ce fut sans encombres qu'ils parvinrent à l'entrée d'un petit village, dont la principale bâtisse était une église, énorme masse sombre surmontée d'une croix. (...)
rugit l'inquisiteur, un rictus haineux sur le visage. Une famille de sorciers qui se terre non loin de Malaca... - Quelle horreur ! s'écria leMontaginois. Et moi qui croyais que la Castille était un territoire exempt de toutes ces pratiques primitives et malsaines ! (...)
Et quand je pense à ces monstres qui prétendent agir au nom de l'Eglise, cela me rend fou ! - Je vous comprends, mon jeune ami, répondit gentiment leMontaginois. Mais ce n'est pas en vous jetant sans réfléchir dans la gueule du loup que vous les aiderez ! (...)
Mère prétend qu'elle est l'incarnation même du baile - notre danse populaire ! - Elle doit susciter bien des jalousies, alors ! sourit leMontaginois. Et briser bien des coeurs... - Malheureusement, oui ! soupira Lucas. C'est en partie à cause de cela que je crains l'intervention de l'Inquisition sur nos terres. (...)
Mais lorsque je l'ai revu, c'était un homme froid, impassible, qui s'était attaché à certaines personnes proches de l'Inquisition. Voilà, Frédéric. Vous savez tout. LeMontaginoiscontempla pensivement les derniers branchages, que les flammes mourantes achevaient de consumer et murmura : - Pas exactement tout, Lucas... pas exactement tout. (...)
Celle de Frédéric hennit, rua, enragée de ne pouvoir rattraper l'autre étalon. Les rênes, rendues glissantes par la pluie échappèrent auMontaginois. Ses cris de frayeur se perdirent dans les hurlement du vent, tandis que l'animal se ruait à la suite de son compagnon. (...)
Le jeune homme était à terre, à présent, aux côtés d'un corps sans vie qu'il tentait tant bien que mal de protéger des assauts déterminés de quatre prêtres armés. Il ne fallut qu'une seconde auMontaginoispour comprendre la situation : son ami n'ayant plus assez de temps pour recharger son arme, il s'était emparé d'une épée gisant sur le sol, mais ne savait manifestement pas s'en servir. (...)
C'étaient des gens simples, chaleureux, cultivés et incroyablement plus tolérants que la plupart desMontaginoisà l'égard des autres. Alonso de Avila, le père de Lucas, lui en avait expliqué la raison une dizaine de jours plus tôt, au cours d'une des longues discussions qu'ils avaient tous les trois le soir, près du feu : les Gallegos, ainsi que la plupart des familles qui occupaient ce territoire montagneux, étaient eux-mêmes considérés comme des étrangers par les Castillians, en raison de leurs traditions et de leurs croyances, largement héritées des Croissantins, ainsi que de leur mode de vie seminomade et, enfin, de leur réserve envers l'Eglise du Troisième Prophète. (...)
Et, il devait bien l'admettre, l'insistance dont il faisait montre auprès de son ami était en grande partie poussée par la curiosité Comme beaucoup deMontaginois, ses connaissances occultes se limitaient aux pouvoirs de Porté développés par certains nobles ou aux terribles capacités des sorcières de la destinée. (...)
- Tiens donc ? Et je suppose que c'est pour cela que vous le traitez moins bien que votre bétail ! attaqua leMontaginois. Don Lucas n'est effectivement pas au mieux de sa forme en ce moment, mais je crois que la mort d'une mère qu'il adorait n'y est pas étrangère, pas plus d'ailleurs que les souffrances morales que vous vous complaisez à lui infliger, ma Dame ! (...)
Frédéric fut contraint d'admettre en son for intérieur qu'il ne s'attendait pas à une réaction si digne. - Aujourd'hui, vous vous êtes fait une ennemie implacable. LeMontaginoistourna la tête. Lucas était là, tenant un cheval par les rênes. - Je revenais de promenade, expliqua le garçon. (...)
Je ne suis pas sorcier moi-même, mais votre magie est bien plus dangereuse que celle de mon peuple. UnMontaginoisqui refuse de pratiquer la magie du sang sera peut-être méprisé par certains nobles, mais il risque beaucoup moins qu'un adepte du feu non éduqué... Ou, du moins, il ne fait pas encourir de danger à ceux qui l'entourent. (...)
Je ne sais pas ce qu'elle prépare, mais cela ne me dit rien qui vaille. - Votre soeur est très jolie, repartit leMontaginoissur le même ton, et sûrement très dangereuse. Mais je ne pense pas qu'une danse suffise à me faire succomber... Il se trompait. (...)
Ils demeurèrent silencieux un long moment. - Pourquoi voulez-vous nous quitter ? reprit Lucas. - Cet objet, expliqua leMontaginoisen tirant la dague de son fourreau, appartenait à mon lieutenant Un cadeau de sa Dame. Il est de mon devoir de gentilhomme de le lui rapporter. (...)
Elle approcha l'animal de la fontaine, afin qu'il puisse s'y abreuver, se passa de l'eau sur le visage et s'accroupit face à eux, les yeux rivés à ceux duMontaginois. - Si je vous indiquais approximativement l'endroit où l'on peut le trouver, accepteriez-vous d'y accompagner mon frère avant de retourner en Montaigne, Monsieur ? (...)
- Je n'ai pas de partenaire, répondit-elle simplement. Que diriezvous d'une promenade, Frédéric ? Le temps est beau, ce soir. LeMontaginoisréprima un mouvement de surprise, puis répondit, d'un ton qui se voulait léger mais laissait transparaître quelque trouble : - Mais ne serait-ce point inconvenant de nous éclipser, vous et moi, seuls et sans chaperon ? (...)
Ils s'éloignèrent peu à peu de l'enceinte de la propriété et s'engagèrent sur un petit sentier qui grimpait le long de la paroi rocheuse. Le coeur duMontaginoisbattait un peu plus vite à chaque pas qui l'éloignait de la sécurité du ranch. Peut-être Lucas avait-il raison, après tout. (...)Une nouvelle de Charlotte Bousquet Rouge, orange, ocre, or... Le corps de la danseuse se tordait tel une flamme au son des tambourins. Sa peau brunie par le soleil se chargeait de reflets cuivrés et ses yeux, noirs, intenses possédaient l'éclat presque insoutenable de la neige des montagnes de la région à leur zénith. Seule au milieu de la piste, elle se laissait porter par la musique, oubliant son public, perdue dans les harmonies des mélodies, de ses rêves, de ce que son âme exprimait ; le ...