Voyage au Centre de la Terre
sur Les Ludopathes
Contient : colère (15)(...) Il était professeur au Johannaeum, et faisait un cours de minéralogie pendant lequel il se mettait régulièrement encolèreune fois ou deux. Non point qu'il se préoccupât d'avoir des élèves assidus à ses leçons, ni du degré d'attention qu'ils lui accordaient, ni du succès qu'ils pouvaient obtenir par la suite ; ces détails ne l'inquiétaient guère. (...)
En effet, dans ses démonstrations au Johannaeum, souvent le professeur s'arrêtait court ; il luttait contre un mot récalcitrant qui ne voulait pas glisser entre ses lèvres, un de ces mots qui résistent, se gonflent et finissent par sortir sous la forme peu scientifique d'un juron. De là, grandecolère. Or, il y a en minéralogie bien des dénominations semigrecques, semi-latines, difficiles à prononcer, de ces rudes appellations qui écorcheraient les lèvres d'un poète. (...)
Quatre idiomes différents dans cette phrase absurde ! Quel rapport pouvait-il exister entre les mots « glace, monsieur,colère, cruel, bois sacré, changeant, mère, arc ou mer ? » Le premier et le dernier seuls se rapprochaient facilement ; rien d'étonnant que, dans un document écrit en Islande, il fût question d'une « mer de glace ». (...)
Malgré les reproches que je croyais être en droit de lui faire, une certaine émotion me gagnait. Le pauvre homme était tellement possédé de son idée, qu'il oubliait de se mettre encolère; toutes ses forces vives se concentraient sur un seul point, et, comme elles ne s'échappaient pas par leur exutoire ordinaire, on pouvait craindre que leur tension ne le fît éclater d'un instant à l'autre. (...)
Elle me donnait les raisons les plus sensées en faveur de notre expédition. Elle m'enchantait, et je me sentais une grossecolèrecontre elle. Quelquefois je voulais m'emporter, mais elle n'y prenait garde et continuait méthodiquement sa tranquille besogne. (...)
Le lendemain, un ciel gris, nuageux, lourd, s'abaissa sur le sommet du cône. Je ne m'en aperçus pas tant à l'obscurité du gouffre qu'à lacolèredont mon oncle fut pris. J'en compris la raison, et un reste d'espoir me revint au coeur. Voici pourquoi. (...)
Que le ciel demeurât couvert pendant six jours, et il faudrait remettre l'observation à une autre année. Je renonce à peindre l'impuissantecolèredu professeur Lidenbrock. La journée se passa, et aucune ombre ne vint s'allonger sur le fond du cratère. (...)
Nous étions à cinq jours de marche du carrefour. Je ne m'appesantirai pas sur les souffrances de notre retour. Mon oncle les supporta avec lacolèred'un homme qui ne se sent pas le plus fort ; Hans avec la résignation de sa nature pacifique ; moi, je l'avoue, me plaignant et me désespérant ; je ne pouvais avoir de coeur contre cette mauvaise fortune. (...)
Il me considéra en croisant ses bras ; puis ces paroles sourdes sortirent de ses lèvres : « Tout est fini ! » Un effrayant geste decolèrefrappa une dernière fois mes regards, et je fermai les yeux. Lorsque je les rouvris, j'aperçus mes deux compagnons immobiles et roulés dans leur couverture. (...)
« Sans compter que, si une verticale de seize lieues s'achète par une horizontale de quatrevingts, cela fera huit mille lieues dans le sud-est, et il y aura longtemps que nous serons sortis par un point de la circonférence avant d'en atteindre le centre ! - Au diable tes calculs ! répliqua mon oncle avec un mouvement decolère. Au diable tes hypothèses ! Sur quoi reposent-elles ? Qui te dit que ce couloir ne va pas directement à notre but ? (...)
XXXVII Il me serait impossible de peindre la succession des sentiments qui agitèrent le professeur Lidenbrock, la stupéfaction, l'incrédulité et enfin lacolère. Jamais je ne vis un homme si décontenancé d'abord, si irrité ensuite. Les fatigues de la traversée, les dangers courus, tout était à recommencer ! (...)
Que ferions-nous au milieu de ce troupeau de quadrupèdes géants ? Venez, mon oncle, venez ! Nulle créature humaine ne peut braver impunément lacolèrede ces monstres. - Nulle créature humaine ! répondit mon oncle, en baissant la voix. Tu te trompes, Axel ! (...)
Nous suivions un plan presque horizontal, quand, au bout de six pas, notre marche fut interrompue par l'interposition d'un bloc énorme. « Maudit roc ! » m'écriai-je aveccolère, en me voyant subitement arrêté par un obstacle infranchissable. Nous eûmes beau chercher à droite et à gauche, en bas et en haut, il n'existait aucun passage, aucune bifurcation. (...)
» Au moment où je prononçai ces paroles, ma main ayant effleuré l'eau, je dus la retirer au plus vite. « L'eau est brûlante ! » m'écriai-je. Le professeur, cette fois, ne répondit que par un geste decolère. Alors une invincible épouvante s'empara de mon cerveau et ne le quitta plus. J'avais le sentiment d'une catastrophe prochaine, et telle que la plus audacieuse imagination n'aurait pu la concevoir. (...)
» répétai-je avec impatience. L'enfant de ne point répondre. « Ah çà ! parleras-tu ? s'écria mon oncle, que lacolèrecommençait à gagner, et qui secoua l'enfant par les oreilles. Come si noma questa isola ? - Stromboli », répondit le petit pâtre, qui s'échappa des mains de Hans et gagna la plaine à travers les oliviers. (...)Jules Verne. Édition du groupe « Ebooks libres et gratuits ». I - Le 24 mai 1863, un dimanche, mon oncle, le professeur Lidenbrock, revint précipitamment vers sa petite maison située au numéro 19 de Königstrasse, l'une des plus anciennes rues du vieux quartier de Hambourg. La bonne Marthe dut se croire fort en retard, car le dîner commençait à peine à chanter sur le fourneau de la cuisine. « Bon, me dis-je, s'il a faim, mon oncle, qui est le plus impatient des ...