Maraudeur n°3 : Le dernier verre
sur Studio09 au format (55.3 Mo)
Contient : gini (19)(...) Avant qu'il n'ait eu l'idée saugrenue de passer sous les roues d'un camion, un soir de virée... Pendant que Susie vaquait à son service et ses pensées, le vieil Indien, de son vrai nomGiniWhitefangs, se mordait les lèvres jusqu'au sang. Il se sentait humilié comme jamais auparavant. (...)
A l'époque on avait parlé de la proximité d'une guerre civile, les journaux avaient même publié plusieurs photos deGiniau milieu des autres insurgés. Mais ils avaient dû abandonner l'île sans même pouvoir se battre, simplement à cause de la lâcheté de leurs meneurs qui n'étaient que des pommes - rouges dehors mais si blancs dedans... Une honte sans nom pour les vrais guerriers amérindiens. Devant cette faiblesse,Giniavait choisi une voie plus radicale et s'était lancé dans différentes affaires illégales jusqu'à un braquage raté à Albuquerque qui s'était soldé par plusieurs morts et vingt années d'emprisonnement dans un établissement fédéral. (...)
Il faut dire que deux décennies à être traité comme la lie de l'humanité par les autres détenus auraient eu raison de n'importe quel homme. Une fois libéré,Giniavait trouvé le réconfort dans l'alcool et la déchéance, ne vivant plus que pour se rappeler sa gloire d'antan. (...)
Là, on était en début de mois et il avait encore les moyens d'acheter du bourbon - le moins cher du bar et qu'il devait faire durer, en plus. Pourtant,Ginisouffrait bien plus de la déchéance de sa nation que celle de sa personne. Qu'étaient devenus les fiers combattants de la Mesa ? (...)
C'était un massacre silencieux, mais implacable... « Ceux qui font leurs cultures au pied de la Mesa » avaient disparu au profit de « ceux qui vendent des colliers de perles et des couvertures tissées au pied de la Mesa ». Finalement,Ginine se sentait que le reflet de son peuple, pas pire individuellement que la nation prise dans son ensemble. (...)
Baigné dans le mauvais whisky, l'esprit du guerrier avait du mal à surnager mais il ne s'était pas déclaré totalement vaincu. Peu avant la fermeture, Susie raccompagna les derniers clients vers la porte et vint prévenirGiniqu'il était temps de rentrer. Elle était en train de lui signifier son congé quand un homme entra dans le bar, chaudement enfoncé dans une redingote sombre. S'approchant de Susie etGini, il les menaça d'un gros automatique. « La vieille, tu te tiens tranquille et tu vides la caisse ! (...)
Devant l'absence de réaction de la patronne, le braqueur lui asséna un violent coup de crosse au visage. Susie s'effondra, les lèvres pissant le sang, sans queGinine fasse le moindre geste. « Tu vas rester là à ne rien faire, toi ? » lui lança-t-elle, postillonnant du sang. (...)
Rien qu'un sauvage alcoolo de merde ! ». La colère se mêlait à ses sanglots. La rage envahit le coeur deGini. Une haine à l'état pur, portée par la colère de son totem, l'ours. Il se mit à désirer la mort de cet homme, de ces trois jeunes de tout à l'heure, de tous les hommes blancs. (...)
Les mots de Susie avaient été l'affront de trop, la marche de trop dans sa descente aux enfers. Cet afflux de haine se traduisit dans sa posture etGinise redressa inconsciemment. « Ouais, c'est ça, Geronimo, essaie un peu de jouer au malin. » Il eut un ricanement méchant « Tu sais quoi ? J'ai toujours souhaité marcher sur les pas de mes ancêtres en me faisant du peau-rouge. »Ginine bougea pas. « Je m'y attendais de la part d'un sauvage » ricana de nouveau le braqueur. Lentement, il tourna son arme vers Susie et lui envoya une balle en pleine poitrine, le sourire aux lèvres. En un éclair,Giniavait envoyé le fond de son verre dans les yeux du braqueur. D'un geste, il était passé par-dessus la table et s'était emparé de l'arme. (...)
Dans tout son être raisonnaient les chants de guerre tribaux. Son agresseur tomba à la renverse et avant qu'il n'ait eu le temps de bouger,Giniavait déjà armé l'automatique et visait sa tête. A ce moment précis, quelque chose d'étrange se passa.Ginisentit en lui une assurance qu'il n'avait plus connue depuis quarante années. La force de la nation navajo coulait à nouveau dans ses veines. « Cochise et Geronimo étaient apaches, bande de crétins. Je suisGiniWhitefangs, du clan Zuni de la nation navajo. » Il s'était redressé de toute sa taille, fier de ce qu'il était. (...)
L'agresseur n'eut pas le temps d'exprimer l'étonnement qu'une balle de .45 lui fracassait la mâchoire, emportant une partie de la trachée dans sa course.Ginipressa à nouveau la détente, par pur plaisir cette fois. Dans le calme soudain revenu,Ginise senti traversé par une vague de paix intérieure. Un long frisson qui achevait sa libération. (...)
Bientôt, la Mesa serait à nouveau parcourue par les troupeaux de bétail de ses frères Navajos et l'homme blanc ne serait plus qu'un souvenir qui s'efface comme les traces dans le sable sont effacées par le vent. Aussi simplement....Giniquitta le bar, laissant la porte grande ouverte derrière lui, ne craignant plus rien ni personne. (...)« Salut Cochise ! » Le vieil indien ne releva même pas la tête devant cette plaisanterie qui semblait bien faire rire son initiateur ainsi que ses deux amis. Susie Sue les observa depuis son comptoir et ne put réprimer un soupir. Elle les connaissait bien ces petits blancs-becs qui venaient s'encanailler le samedi soir à la limite de la nation Navajo. Ici à Bluff, Utah, leur statut de jeune blanc équivalait à une carte « Vous êtes libérés de prison » alors que quelques miles plus au ...