Histoire de Marin : Prise d'un Convoi Espagnol
Le brouhaha de la salle enfumée de l'auberge du Rat qui Pète fait lentement place au silence le plus complet. Tous les regards se tournent vers le vieil homme, maigre et ratatiné, qui se tient debout au comptoir. Son visage rouge de chaleur est marqué par des années d'une consommation immodérée de rhum. Comme s'il ignorait être au centre de l'attention, le vieil homme sort sa corde de tabac, qu'il mord pour en retirer une chique énorme. « Sang du diable, te fais pas prier, vieux Ben. Tu la racontes ...Contient : convoi (12)Histoire de Marin : Prise d'unConvoiEspagnol Le brouhaha de la salle enfumée de l'auberge du Rat qui Pète fait lentement place au silence le plus complet. (...)
Il n'a pas fallu longtemps avant que la vigie ne se mette à hurler du haut de son perchoir : « Capitaine, trois voiles, non, cinq voiles à onze heures.Convoiprobablement espagnol protégé par un navire de guerre ». Il a bonne vue, notre Bûcheron, parce qu'avec la lunette, c'est à peine si je devine des points sombres à l'horizon. (...)
» Un petit sourire de sa part comme de la mienne, et tout est dit. C'est foutrement beau l'amitié ! On attend que la nuit tombe, tout en suivant de très loin leconvoi. Dès que l'obscurité nous englobe, leconvoinous indique sa position par ses fanaux, preuve qu'il ne nous a pas repéré. En tant que quartier-maître, Ange touche deux mots à de Vercourt de l'état d'esprit de ses hommes. (...)
N'avons nous pas pris Vera Cruz, et un trois-ponts à cinquante ? Si vous étiez un membre de ce foutuconvoi, à l'horizon, et que vous étiez protégés par un navire de guerre, une bonne Frégate de 30 canons de dix-huit, vous auriez peur de quatre-vingts pirates couards et veules ? (...)
Des murmures ont parcouru l'équipage, touché par le reproche. « Vous êtes d'accord avec moi, attaquer un telconvoi, c'est de la folie pure. Et bien c'est justement pour cette raison que nous vaincrons une fois de plus. (...)
Ce n'est pas une misérable cargaison à la hauteur de votre piètre courage que nous allons ramener, mais cinq galions chargés d'un butin à faire palir Roberts lui-même. Etes-vous prêts à annoncer à Rackham que nous avons laissé filer unconvoichargé de vaisselle d'or et d'argent ? ». L'équipage, comme un seul homme se met à crier qu'il n'en est pas question et les matelots, l'or déjà devant les yeux lancent un triple hourra pour le capitaine. (...)
Cette nuit-là, il fait noir comme dans le cul de FetNat, mais les fanaux des Espagnols nous guident dans la pénombre. On navigue sous grand-voile et misaine seules, pour ne pas se faire remarquer. Rattraper leconvoiest un jeu d'enfant, parce qu'ils ont mis en panne pour la nuit. Alors qu'on passe près du dernier navire duconvoi, tous les hommes ne tiennent plus en place et attendent avec impatience le signal du capitaine. Alors que l'on est déjà bord contre bord, l'autre navire ne nous voit pas, mais nous pouvons distinguer les Espagnols sur le pont. (...)
De Vercourt et moi, on rentre dans la salle du conseil avec le capitaine du Libertad pour causer. Notre capitaine lui demande de lui donner les détails de la signalisation entre les membres duconvoi. Il a cru nous avoir, ce gros porc suant, mais j'ai vite compris qu'il nous indiquait comment aider ses petits copains à nous cueillir. (...)
Evidemment, il n'y a de blessés chez nous ni d'un côté ni de l'autre, mais pour faire plus vrai, quelques Espagnols peu coopérants sont passés par-dessus bord ou par les armes de façon spectaculaire, pour donner le change aux autres navires espagnols duconvoi. Comme leconvois'était assez distendu pendant la nuit, le temps qu'il rapplique, nous avons largement le temps de simuler une prise du navire pirate et de hisser les pavillons indiquant notre victoire. Le Pélican, beaucoup plus petit que le Libertad, est attaché en allège à la poupe du Libertad, toutes voiles carguées, pour se présenter comme un navire tout à fait inoffensif. (...)