JdRP Previews : Introduction à Qin
(...) En combat singulier, la frêle jeune fille de quinze ans n’aurait eu aucune chance contre les terribles membres de la garde personnelle de Poing de Bronze, les mercenaires les plus cruels au service du roi du Zhao. Le grand Royaume n’était qu’à une journée de cheval au nord, mais la paix régnait actuellement dans cette région frontalière. Les mercenaires étaient apparus au matin, venant de l’Est. Leurs froides silhouettes et celles de leurs chevaux puissants se découpaient dans l’aube rouge. (...)
Sanglés dans leurs armures rouges, au milieu du tumulte et de la fumée, elle avait pensé que le Feng Du ouvrait ses portes et déversait ses hordes damnées sur sa maison. Les soldats tuaient les hommes, un sourire aux lèvres, abattaient leurs sabres sanglants, rugissant comme des démons. Il ne leur fallut que quelques minutes pour achever leur sinistre besogne. Ils rassemblèrent ensuite les survivants, femmes, enfants et vieillards au coeur du village en proie aux flammes. (...)
De là, elle avait assisté au massacre de son père et de ses deux frères. Ju, son cadet dont elle aimait tant le sourire et la voix chantante, avait tenté de résister, armé d’un pauvre râteau de bois. Sa tête avait roulé à quelques mètres de la cachette de l’adolescente. L’un de bandits descendu de sa monture y avait par jeu donné un coup de pied. Su Yi s’était mordue la lèvre jusqu’au sang afin de ne pas crier, hurler de peur et de chagrin et trahir ainsi sa présence. (...)
Elles n’étaient plus qu’une trentaine, destinées à rejoindre les bordels de quelque ville de garnison. Les mercenaires pilniers et remplirent leurs besaces de cuir craquelé des rares objets de valeur qu’ils trouvèrent. (...)
Ils incendièrent même le temple de Shen Nong puis firent monter leurs captives aux pieds et aux mains entravés par des cordes rugueuses dans de lourds chariots aux roues cerclées de bronze. Su Yi releva péniblement la tête et jeta un dernier regard vers ce qui avait été son seul foyer. (...)
Lorsque le soleil pâle de l’automne déclina derrière les frondaisons de la forêt qui bordait son village au nord, le convoi fit halte un peu en retrait de la route. Toujours attachées, les captives reçurent un maigre bol de soupe pour toute nourriture. Les mercenaires, une trentaine compta SuYi, établirent un bivouac de fortune. Autour d’un large feu, ils commencèrent à boire à même la cruche un mauvais vin dont les relents acides remontaient jusqu’aux chariots. (...)
Mais lorsque la main de l’ivrogne s’approcha de son visage, à nouveau Su Yi sentit monter en elle cette force sauvage. L’adolescente planta vigoureusement ses dents dans la paume dénudée et le soldat poussa un hurlement de douleur et de surprise. (...)
Un long manteau à capuchon couvrait ses épaules et sa tête, masquant le haut de son visage et ne laissant apparaître que quelques mèches de cheveux d’un noir brillant. Brodées sur l’un des côtés du vêtement, les armes honnies de Poing de Bronze. Relevant la tête, Su Yi devinait plus qu’elle ne voyait la bouche fine aux lèvres pourpres et les traits délicats de la jeune femme. Ses pieds nus semblaient n’effleurer qu’à peine l’herbe grasse et des bracelets d’or tintaient autour de ses chevilles et de ses poignets. (...)
Su Yi remarqua les ongles de la jeune femme, longs et verts, brillants comme le jade le plus pur. Elle embaumait le jasmin. Le mercenaire brandissait déjà son sabre au-dessus de la tête de l’adolescente, mais un ordre ferme de la femme arrêta son geste. Sa voix était rauque et autoritaire, elle semblait habituée à ce qu’on lui obéisse. L’homme recula immédiatement et Su Yi crut discerner de la peur sur sa face avinée. (...)
La mystérieuse femme s’approcha d’elle et, sous le capuchon de son manteau noir, semblait l’observer. « Cette fille porte la Marque. Nul ne doit la toucher. Elle appartient à ton maître. » Le capuchon d’ombre se tourna vers le soudard. (...)
« Tu ne voudrais pas encourir la fureur de ton seigneur, n’est-ce pas ? Ni la mienne ? » L’homme balbutia quelques mots incom- préhensibles, tremblant de peur. Les autres mercenaires s’étaient figés sur place et regardaient la scène, avec dans les yeux le même effroi. La femme se détourna et commença à s’éloigner. (...)
Su Yi avait perçu de sa crainte, elle ne savait qui pouvait bien être la femme étrange, mais elle occupait certainement une place de choix dans la hiérarchie des mercenaires de Poing de Bronze. Une sorcière peut-être, ou pire, un Emo. Cela expliquerait sans doute la sauvagerie avec laquelle ces hommes avaient attaqué son village. Su Yi ignorait totalement ce que la femme en noir avait voulu dire. Quelle marque ? Et que lui voulait Poing de Bronze ? Elle ne l’avait même jamais rencontré. En tout cas, une chose était sûre, elle ne devait pas rester là à attendre qu’un sort pire que la mort s’abatte sur elle. Elle tendit innocemment ses mains liées devant elle, un faible sourire à peine esquissé sur ses lèvres fines. Le garde cracha par terre et daigna s’approcher. Il sortit un court poignard d’un étui d’os qui battait contre sa cuisse et trancha d’un seul geste la lourde corde. Su Yi baissa la tête et massa ses poignets endoloris. Des stries sanglantes marquaient sa peau délicate et elle se promit que plus personne jamais ne l’entraverait ainsi. (...)
Le garde n’avait pas bougé d’un pouce, à quelques pas derrière elle. Il la regardait avec une concupiscence évidente, passant une langue avide sur ses lèvres rouges. Mais l’adolescente devinait également dans ses yeux le terrible interdit que lui avait formulé la femme en noir. Elle laissa doucement glisser son manteau sur le sol et ramena ses nattes sur ses épaules. (...)
Elle le regarda sans ciller, droit dans les yeux. Sourcils froncés, il la toisa quelques secondes puis un sourire hautain passa sur son visage buriné. Il remit son poignard en place et se saisit d’une des longues tresses de Su Yi, défaisant le noeud qui la maintenait en place. L’adolescente lui sourit, comme pour le remercier, un sourire sans chaleur, presque carnassifaction lorsqu’un masque de surprise et de douleur figea la face du mercenaire. Les yeux écarquillés, sans un cri, il glissa lentement vers le sol, un moment à genoux devant elle puis s’effondra, les deux mains sur son ventre ouvert, dans une vaine tentative de retenir le souffle de vie qui l’abandonnait. Su Yi contemplait le cadavre, les jointures de ses longs doigts blanchis à trop serrer le poignard ensanglanté. Elle venait de tuer un homme et ne ressentait rien, ni effroi, ni soulagement. (...)
Il fallait fuir, très vite, très loin. Elle enfila rapidement son chang pao, noua sa ceinture et y glissa le poignard effilé. Avec peine, elle poussa le corps dans le trou d’eau. Il flotta quelques secondes puis, attiré vers le fond par le poids de son armure, disparut sous les feuilles brunes. (...)
La jeune fille se mit à courir à travers la forêt, dans la direction opposée aux rires et aux cris qui se mêlaient derrière elle. Il ne fallut qu’une dizaine de minutes aux mercenaires pour qu’ils découvrent sa disparition, alertés par l’absence prolongée de leur camarade. (...)
Le maître voulait cette fille, il fallait la lui ramener, coûte que coûte. La mystérieuse femme en noir demeurait silencieuse, immobile au milieu du tumulte. Un pâle sourire se dessina sur ses lèvres. « Cours comme le vent, fille du Dragon. Je t’ai donné une chance, à toi de la saisir et d’accomplir ton destin. Cours et ne te retourne pas. Nous nous reverrons, mais tu ne seras plus la même. (...)
Elle ne voyait nulle prise ou s’accrocher, nul sentier permettant de contourner le mur de rochers. Plus bas, elle entendait les voix de ses poursuivants qui se rapprochaient, jurant et la maudissant. Un instant, la jeune fille faillit céder au découragement. Mais non, elle n’avait pas enduré tout cela pour en finir ainsi. Elle saisit le poignard passé à sa ceinture et se retourna vivement. Adossée à la paroi verticale, l’arme tendue devant elle, Su Yi se jura qu’ils ne l’auraient pas vivante… et qu’au moins l’un d’eux mourrait avec elle. Dans quelques minutes, les mercenaires seraient là. Et tout serait fini. C’est à cet instant qu’elle sentit qu’on la tirait en arrière… Su Yi, totalement surprise, bascula en arrière et s’affaissa sur le sol de pierre. (...)
Il faisait froid tout à coup et sa respiration formait des volutes de vapeur autour de sa bouche. Su Yi se redressa promptement, brandissant son poignard, tous ses sens en alerte. Elle n’entendait plus les voix de ses ravisseurs, mais elle ne se sentait pas non plus seule ici. Et où se trouvait donc cet ici ? « Range ton croc petite, fille. Il ne m’impressionne pas. » La voix était rugueuse mais douce. On aurait dit celle d’un vieillard, mais elle vibrait d’une force surnaturelle. (...)
Qui sont donc ces gredins et que te veulent-t-ils ? Attention, ne me mens pas, je le saurai. » Su Yi était convaincue que la voix venant de nulle part disait la vérité. « Ce sont des mercenaires au service de Poing de Bronze. Ils ont détruit mon village et massacré ses habitants. Leur maître me veut à cause de je ne sais quelle marque. Je suis fatiguée, j’ai faim et j’ai froid. Je vous en prie, qui que vous soyez, ne les laissez pas me trouver. » « La Marque ? Serait-ce possible ? Enfin... » « Mais de quoi parlez-vous à la fin ? Et qui êtes-vous ? » Surgissant soudain de l’ombre, une énorme gueule légendaire vint se coller à quelques centimètres du visage de la jeune fille. Elle sursauta brusquement, lâchant son poignard qui chuta en tintant sur le sol. « Et bien quoi ? Tu n’as jamais vu de dragon ? Non, apparemment. Ne t’inquiète pas, je ne vais pas te manger. Ouvre grand tes yeux que je vérifie si… Oui ! La Marque ! » Su Yi sentait l’haleine du dragon effleurer son visage. Ses écailles bleues luisaient faiblement, son corps de serpent se perdant dans les ombres de la grotte. Il plongeait son regard expressif dans celui de l’adolescente et semblait… sourire. « Mais, je ne comprends rien. Je… » « Peu importe, jeune fille, » la coupa le dragon « Le signe est là. Elue du destin, je t’attends depuis bien longtemps. Es-tu prête ? » Su Yi se sentait perdue et sa fatigue laissait place à de la colère, celle d’avoir l’impression de quitter un danger pour un autre plus grand encore. « Prête à quoi ? Explique toi dragon ou il va t’en cuire ! » « Ha ha ! Sale caractère, j’adore. » Son rire fit trembler la voûte et Su Yi ne put s’empêcher de porter instinctivement ses mains au-dessus de sa tête. (...)
Peux- tu détruire mes ennemis, les faire souffrir, lacérer leurs corps et déchirer leurs âmes ? Peux-tu faire cela, dragon ? » Le dragon fronça les sourcils. « Charmante nature. Non, ce n’est pas mon rôle, mais je peux te donner le pouvoir d’accomplir tout cela. Je t’apprendrai les lois de l’univers et les arts de la guerre. (...)
Mais tu devras pour cela renoncer à Su Yi la paysanne. » « Su Yi est déjà morte » se renfrogna-t- elle. « Si tu peux faire tout cela pour moi dragon, alors je me soumettrai au destin que tu me proposes. » « Je n’en doute pas un seul instant. As-tu vraiment le choix ? (...)
Mais ceux-là, je veux que ton juste courroux s’abatte sur eux. Tue les ! » « Mais comment ? Ils sont quatre ! Ce sont des guerriers, et moi… Tu m’as menti dragon ! » Gronda-t-elle. « Silence enfant ! Et apprends. Ramasse ton poignard et prépare toi. Laisse toi faire, je vais guider ta main. Observe et vois la puissance des héros! » Le dragon se lovait maintenant tout autour d’elle et la jeune fille sentit un frisson parcourir son échine. (...)
Ils avaient posé négligemment au sol leurs armes de fer. Elle ne ressentait rien hormis une froide détermination. Le poignard dans sa main lui paraissait n’être qu’une simple extension d’elle-même. Elle entendit Sagesse Riante murmurer à son oreille. (...)
» Elle prit une profonde inspiration et se pré- para à bondir. Su Yi était morte. Désormais, Poing de Bronze apprendrait à craindre Coeur de Jade. Elle pensa alors qu’elle venait de renaître. Qin, le jeu de rôle : Qin - le jeu de rôle vous permet de vivre des aventures palpitantes dans un cadre historique dense et fascinant, et devenir ainsi vous-même une légende dans cette Chine antique des Royaumes combattants appelée à disparaître sous le joug de la dictature et de la bureaucratie. Intrigues, combats, quêtes, magie et créatures mythiques vous y attendent. Héros en quête d’aventure, de gloire ou d’immortalité, vous pourrez sauter sur les toits, vous battre en duel contre les plus fines lames du Chu, comploter contre le Roi de Qin ou celui du Zhao, pactiser avec les esprits ou découvrir les fruits des Iles immortelles, lire les oracles sur des bi de jade ou des carapaces de tortue, diriger vos troupes à l’assaut d’une forteresse, rechercher des sages taoïstes pour suivre leurs enseignements, chasser les fantômes, utiliser la force du chi pour accomplir des hauts-faits dignes des immortels. Chevalier errant ou mercenaire, voleur ou cour- tisane en fuite, exorciste ou alchimiste, simple soldat ou général d’armée, le destin vous invite tous à entrer dans la légende de cette Chine oubliée. (...)
Tous réunis autour d’une table, le Meneur de Jeu commence à conter son aventure et les joueurs y réagissent en interprétant leurs personnages : « Vous flânez tous ensemble entre les étals d’un marché du petit village de Juhan, à la frontière entre le Qin et le Zhao. C’est la fête de l’automne et les paysans célèbrent des récoltes abondantes. Tout le monde s’amuse et l’atmosphère est à la joie. (...)