Place des Grands Gnomes
Contient : partie (11)Place des Grands Gnomes Comment sortir d'unepartiede jeu de rôles. Comment en finir, la quitter ? Comment terminer une campagne mémorable ? Comment changer de jeu ? (...)
Selon Roger Caillois, il n'y a même qu'une règle du jeu qui vaille : celle qui consiste « à fasciner le spectateur, en évitant qu'une faute conduise celui-ci à refuser l'illusion ». Même dans unepartied'échec la préservation du roi se rattache à son assimilation provisoire au Moi du joueur. Celui-ci doit être capable d'investir le plus intensément possible cette convention, et de retirer instantanément cet investissement lorsque lapartieest finie. Le jeu est ainsi une création dont le joueur reste maître par empire selon Karl Groos. (...)
Selon la qualité des émotions qu'ils procurent, selon leur puissance addictive, selon leur prégnance symbolique et mentale, et selon la façon dont ils «engramment» leurs codes ludiques dans nos cerveaux, certains jeux nous habitent, et parfois nous squattent, avec une longévité qui excède largement leur temps departiemesurable. Le risque est alors grand de se retrouver à divaguer dans telle boutique spécialisée à propos de lapartiede la veille... On ne sait plus si l'on parle du souvenir d'un jeu ou de ... ses souvenirs ! En effet, chaquepartieest une manière de représenter le monde, le réceptacle de systèmes de valeurs ou de systèmes formels abstraits (les règles). Elle peut être considérée comme une métaphore du monde. Jouer et/ou inventer un jeu, construire unepartieen interaction avec les autres joueurs relève alors d'une activité culturelle de haut niveau, et certains sont allés jusqu'à prétendre que chaquepartiejouée est une forme d'?uvre d'art*. Sacré rôliste Selon Johan Huizinga, comme le sacré, le jeu ne vaut qu'à l'intérieur de frontières temporelles et spatiales précises, la durée de lapartie. Non pas qu'il annule toutes les lois, il les rendrait plutôt particulièrement lisibles et univoques, aboutissant par l'intermédiaire des règles à une stylisation extrême de la réalité, une sorte d'épure démocratique puisqu'il tient compte de chaque joueur (il favorise l'intégration, met en avant des enjeux comme le sacrifice, la prise de risque pour l'autre, la protection . (...)
Mais lorsque la messe est dite, c'est l'heure de l'abandon et il faut bien dire que dans une vie de rôliste assidu, il n'est pas rare de croiser un syndrome qui s'apparente au «post-coïtum animal triste», une sorte d'affaissement légèrement dépressif qui survient après une immersion intense et prolongée dans le monde d'un jeu dont il a bien fallu achever lapartie(de campagne). Ainsi, l'expérience rôlistique est parfois si exaltante qu'elle peut que succéder un vide frustrant, le temps que (en général dans la rue au milieu de la nuit) se réajustent nos sens et notre perception du réel. (...)
Il existe donc une certaine ambivalence entre le joueur et le personnage qu'il incarne : il y place unepartiede lui-même mais garde toujours un regard critique sur la réalité de cette incarnation - s'il veut éviter de voir arriver les gentils messieurs habillés en blanc. (...)Comment sortir d'une partie de jeu de rôles. Comment en finir, la quitter ? Comment terminer une campagne mémorable ? Comment changer de jeu ? Comment, par exemple, rompre avec Rêves de Dragons, après lui avoir consacré, comme votre serviteur, plus de sept cent heures de sa vie ? Comment lui dire adieu une fois épuisés les scénarios du commerce et presque tous les scénarios parus dans les magazines ? L'Empire du Roi Joueur Avouons-le, les jeux de rôles ont une puissance ...