Le Mystère de l'abbaye
sur Arnheim
Contient : minuit (7)(...) Les heures passées dans le scriptorium ou dans le froid de l'église, sans bouger de son siège, étaient assez éprouvantes et malgré l'approche de la grande messe deminuit, les esprits étaient plutôt renfrognés. Aussi, lorsque le frère Finnean interpella Torradan le bibliothécaire qui traversait la cour d'un pas vif pour lui demander un renseignement anodin, il ne fut guère surpris de ne recevoir qu'un murmure empressé comme réponse. (...)
En hâte, il finit d'emballer ses papiers et se dirigea en courant vers l'entrée des caves, tandis que les moines commençaient à se rassembler devant l'église pour la messe deminuit. Il lui restait peu de temps. Les marches étaient glissantes et ruisselantes d'humidité. La neige fondue par les allées et retours des moines et des serviteurs dégoulinait en une eau noirâtre vers les profondeurs de l'abbaye, et Torradan était forcé d'avancer prudemment malgré sa hâte à atteindre la cave. (...)
Lorsqu'il déboucha enfin dans la vaste cave de l'abbaye, son excitation était à son comble. Il était presqueminuit, et selon toute vraisemblance l'heure de l'ouverture du passage n'allait pas tarder à sonner. (...)
Torradan ignorait comment le mécanisme d'ouverture fonctionnerait : Eadan ne donnait aucune indication à ce sujet. Peut-être quelque ingénieux mécanisme d'horlogerie, réglé pour ne s'ouvrir qu'une fois l'an àminuit, la nuit de Noël, commandait l'ouverture... Quant à l'étoile de l'énigme, cela devait faire référence à celle des rois mages, guidant de sa lumière les trois rois vers le lieu de naissance du Christ. (...)
Ces moment lui semblèrent durer des heures. Enfin, après une attente insoutenable, les douze coups deminuitrésonnèrent faiblement au loin. La porte allait s'ouvrir. La porte de l'église s'ouvrit violemment et alla frapper le linteau de pierre avec un bruit sourd. (...)
Le vide laissé par l'échec de toutes ses recherches lui apparaissait à présent dans toute son ampleur, et malgré ses 42 ans et les nombreuses désillusions qu'il avait connues au cours de sa vie, il avait bien du mal à contenir ses larmes d'amertume. La messe deminuitétait bien avancée maintenant, et le cérémonial se poursuivait avec l'exacte rigueur qui avait toujours prévalu depuis la création de l'abbaye. (...)
Les paysans étaient déjà repartis, seuls restaient les hommes d'église pour continuer l'office. Torradan était encore sous le choc de sa désillusion. La porte ne s'était pas ouverte àminuit, la dalle noire était restée immobile. Il s'était donc trompé d'un bout à l'autre en accordant quelque foi à de vieilles légendes sans fondement. (...)En cette veille de Noël 1226, la neige était tombée en abondance sur Inverness et s'était accumulée sur les toits de l'abbaye de Saint André. Depuis deux bons mois, les moines avaient troqué leurs traditionnelles sandales contre des chausses rembourrées de laine, bien plus confortables et surtout bien plus chaudes. Les heures passées dans le scriptorium ou dans le froid de l'église, sans bouger de son siège, étaient assez éprouvantes et malgré l'approche de la grande messe de minuit, les esprits ...