Voyage au Centre de la Terre
sur Les Ludopathes
Contient : croire (19)(...) I Le 24 mai 1863, un dimanche, mon oncle, le professeur Lidenbrock, revint précipitamment vers sa petite maison située au numéro 19 de Königstrasse, l'une des plus anciennes rues du vieux quartier de Hambourg. La bonne Marthe dut secroirefort en retard, car le dîner commençait à peine à chanter sur le fourneau de la cuisine. « Bon, me dis-je, s'il a faim, mon oncle, qui est le plus impatient des hommes, va pousser des cris de détresse. (...)
« Je n'ai jamais vu chose pareille ! disait la bonne Marthe. M. Lidenbrock qui n'est pas à table ! - C'est à ne pas lecroire. - Cela présage quelque événement grave ! » reprenait la vieille servante en hochant la tête. (...)
Il allait et venait ; il prenait sa tête à deux mains ; il déplaçait les sièges ; il empilait ses livres ; il jonglait, c'est à ne pas lecroire, avec ses précieuses géodes ; il lançait un coup de poing par-ci, une tape par-là. Enfin ses nerfs se calmèrent et, comme un homme épuisé par une trop grande dépense de fluide, il retomba dans son fauteuil. (...)
Je me précipitai vers mon miroir. Eh bien, j'avais moins mauvaise mine que je ne le supposais. C'était à n'y pascroire. « Axel, me dit Graüben, j'ai longtemps causé avec mon tuteur. C'est un hardi savant, un homme de grand courage, et tu te souviendras que son sang coule dans tes veines. (...)
Au retour, Axel, tu seras un homme, son égal, libre de parler, libre d'agir, libre enfin de... » La jeune fille, rougissante, n'acheva pas. Ses paroles me ranimaient. Cependant je ne voulais pascroireencore à notre départ. J'entraînai Graüben vers le cabinet du professeur. « Mon oncle, dis-je, il est donc bien décidé que nous partons ? (...)
La lumière électrique faisait splendidement étinceler les schistes, le calcaire et les vieux grès rouges des parois ; on aurait pu secroiredans une tranchée ouverte au milieu du Devonshire, qui donna son nom à ce genre de terrains. Des spécimens de marbres magnifiques revêtaient les murailles, les uns, d'un gris agate avec des veines blanches capricieusement accusées, les autres, de couleur incarnat ou d'un jaune taché de plaques rouges, plus loin, des échantillons de ces griottes à couleurs sombres, dans lesquels le calcaire se relevait en nuances vives. (...)
Les ténèbres, toujours profondes à vingt pas, empêchaient d'estimer la longueur de la galerie, et je commençai à lacroireinterminable, quand soudain, à six heures, un mur se présenta inopinément à nous. A droite, à gauche, en haut, en bas, il n'y avait aucun passage. (...)
Il s'approcha de mon oncle, lui mit la main sur l'épaule et l'éveilla doucement. Mon oncle se leva. « Qu'est-ce donc ? fit-il. - Vatten », répondit le chasseur. Il fautcroireque sous l'inspiration des violentes douleurs, chacun devient polyglotte. Je ne savais pas un seul mot de danois, et cependant je compris d'instinct le mot de notre guide. (...)
J'écoutai si quelque appel ne m'était pas adressé, et dans cette atmosphère si dense, il pouvait m'arriver de loin. Un silence extraordinaire régnait dans l'immense galerie. Je m'arrêtai. Je ne pouvaiscroireà mon isolement. Je voulais bien être égaré, non perdu. Egaré, on se retrouve. « Voyons, répétai-je, puisqu'il n'y a qu'une route, puisqu'ils la suivent, je dois les rejoindre. (...)
Lorsque je pus les rouvrir, je demeurai encore plus stupéfait qu'émerveillé. « La mer ! m'écriai-je. - Oui, répondit mon oncle, la mer Lidenbrock, et, j'aime à lecroire, aucun navigateur ne me disputera l'honneur de l'avoir découverte et le droit de la nommer de mon nom ! (...)
Bientôt toute terre fut perdue de vue, tout point de repère disparut, et, sans le sillage écumeux du radeau, j'aurais pucroirequ'il demeurait dans une parfaite immobilité. Vers midi, des algues immenses vinrent onduler à la surface des flots. (...)
A dix heures du matin, les symptômes de l'orage sont plus décisifs ; on dirait que le vent mollit pour mieux reprendre haleine ; la nue ressemble à une outre immense dans laquelle s'accumulent les ouragans. Je ne veux pascroireaux menaces du ciel, et cependant je ne puis m'empêcher de dire : « Voilà du mauvais temps qui se prépare. (...)
Son foyer n'existait plus en un point déterminé de l'espace et elle ne produisait aucun effet d'ombre. On aurait pu secroireen plein midi et on plein été, au milieu des régions équatoriales, sous les rayons verticaux du soleil. (...)
Et maintenant que j'y songe tranquillement, maintenant que le calme s'est refait dans mon esprit, que des mois se sont écoulés depuis cette étrange et surnaturelle rencontre, que penser, quecroire? Non ! c'est impossible ! Nos sens ont été abusés, nos yeux n'ont pas vu ce qu'ils voyaient ! (...)
Toujours Arne Saknussemm ! » XL Depuis le commencement du voyage, j'avais passé par bien des étonnements ; je devais mecroireà l'abri des surprises et blasé sur tout émerveillement. Cependant, à la vue de ces deux lettres gravées là depuis trois cents ans, je demeurai dans un ébahissement voisin de la stupidité. (...)
Rien n'existait plus pour moi à la surface de ce sphéroïde au sein duquel je m'étais engouffré, ni les villes, ni les campagnes, ni Hambourg, ni Königstrasse, ni ma pauvre Graüben, qui devait mecroireà jamais perdu dans les entrailles de la terre. « Eh bien ! reprit mon oncle, à coups de pioche, à coups de pic, faisons notre route et renversons ces murailles ! (...)
Je m'attendais à voir un cône couvert de neiges éternelles, au milieu des arides déserts des regions septentrionales, sous les pâles rayons d'un ciel polaire, au delà des latitudes les plus élevées, et, contrairement à toutes ces prévisions, mon oncle, l'Islandais et moi, nous étions étendus à mi-flanc d'une montagne calcinée par les ardeurs du soleil qui nous dévorait de ses feux. Je ne voulais pas encroiremes regards ; mais la réelle cuisson dont mon corps était l'objet ne permettait aucun doute. Nous étions sortis à demi nus du cratère, et l'astre radieux, auquel nous n'avions rien demandé depuis deux mois, se montrait à notre égard prodigue de lumière et de chaleur et nous versait à flots une splendide irradiation. (...)
- Mais la boussole ? répondit mon oncle. - Oui ! la boussole ! disais-je d'un air embarrassé. A l'encroire, nous avons toujours marché au nord. - Elle a donc menti ? - Oh !menti ! - A moins que ceci ne soit le pôle nord ! (...)
Grâce aux indiscrétions de Marthe, la nouvelle de son départ pour le centre de la terre s'était répandue dans le monde entier. On ne voulut pas ycroire, et, en le revoyant, on n'y crut pas davantage. Cependant le présence de Hans, et diverses informations venues d'Islande modifièrent peu à peu l'opinion publique. (...)Jules Verne. Édition du groupe « Ebooks libres et gratuits ». I - Le 24 mai 1863, un dimanche, mon oncle, le professeur Lidenbrock, revint précipitamment vers sa petite maison située au numéro 19 de Königstrasse, l'une des plus anciennes rues du vieux quartier de Hambourg. La bonne Marthe dut se croire fort en retard, car le dîner commençait à peine à chanter sur le fourneau de la cuisine. « Bon, me dis-je, s'il a faim, mon oncle, qui est le plus impatient des ...