Ciel et Terre
sur Chaodisiaque au format
Le maître du vent. Je m'appelle Ciel Noir. Je ne suis qu'un homme. Le sang qui coule dans mes veines n'est pas celui des dieux, ni celui des dragons, il me permet juste d'animer ce corps, de pousser cette charrue qui creuse son sillon pour m'offrir de quoi me faire vivre, de parler, et parfois, faire naître un sourire sur le visage de ma femme. Ce village est petit, si petit qu'il ne porte pas de nom, à peine une centaine de paysans l'animent, survivant avec moi, leurs âmes revêtues ...Contient : petit (32)(...) Le sang qui coule dans mes veines n'est pas celui des dieux, ni celui des dragons, il me permet juste d'animer ce corps, de pousser cette charrue qui creuse son sillon pour m'offrir de quoi me faire vivre, de parler, et parfois, faire naître un sourire sur le visage de ma femme. Ce village estpetit, sipetitqu'il ne porte pas de nom, à peine une centaine de paysans l'animent, survivant avec moi, leurs âmes revêtues des chairs marquées par les éléments et le temps, couverts de haillons de cuir et de tissus misérables. Un village perdu au milieu de cette terre que j'ai vue creusée par mon père avant moi et que mon fils creusera sous mes yeux et bien après. (...)
Mon fils lui ressemble beaucoup, mais son regard est plus inquiet, plus nerveux. Je l'ai nommé Brin d'Herbe : il en a toujours un dans la bouche, qu'il mâchonne nerveusement.Petitmais vif, il fait penser à un rongeur. Tous trois, nous essayons de dégager la charrue de ce bourbier que j'ose appeler mon champ. (...)
Moi, Boeuf Assoiffé, Regard Vif, Nuage Bleu, Flocon Amer, Pigeon Fou et Cuillère d'Argent formons notrepetitconseil de survivants. Nous nous rassemblons au moins trois ou quatre fois par ans pour discuter du goût de la bière, d'histoires de femmes, de chasse et disputer des parties de cartes. (...)
Un grognement d'assentiment balaie la pièce enfumée. - Je sais. Il va falloir trouver un arrangement. - Le cannibalisme ? C'est Pigeon Fou : Unpetitbonhomme à la peau ridée dont les dents se bousculent de manière anarchique dans une bouche perpétuellement souriante. (...)
Parfois, l'une d'entre elle parvient à passer au travers et retombe sourdement par terre, ou dans unpetitéclat lorsqu'elle atteint le feu qui nous enfume et nous réchauffe. En dehors du raclement des cuillères en bois, des bruits de mastication, ce sont pratiquement les seuls bruits qui se font entendre dans la hutte. (...)
Quelque chose s'agite à nouveau en moi, j'ignore quoi, je n'aime pas ça et je rabaisse la bâche entre nous. Nous repartons. Je jette un regard vers mon village, encore pluspetitvu de loin. Je revois les visages d'Aube Grise et Brin d'Herbe, les chassent de mon esprit et fixe la piste qui file devant nous à travers la plaine balayée par le vent. (...)
Au bout d'un temps, la piste s'efface, mais le chemin du Trône d'Orage nous est familier, aussi nous contentons-nous de surveiller les plantes dans l'herbe encore trempée de pluie dupetitmatin. Quand nous apercevons un arbrisseau couvert de feuilles blanches et de fleurs aux pétales transparents comme du verre, c'est le signe qu'une faille n'est pas éloignée et nous nous en éloignons presque instinctivement, sans un mot. (...)
Il a passé trop de temps à parader dans le village avec sa foutue épée, à regarder les yeux des jeunes femmes de la barrière s'extasier sur ses muscles aupetitmatin. Il va mourir parce qu'il devait faire ses besoins avec un peu d'intimité. Il se croit encore au village. (...)
Je pourrais en vouloir à Boeuf, mais dans la plaine morne et débilitante, n'importe qui peut s'endormir à force d'ennui. Je l'avais dit à OEil Vert, Rude Automne et Chien Enragé. Boeuf s'est réveillé aupetitmatin, seul. Son cri d'angoisse nous a éveillés brutalement. Comme les autres, je me suis levé le coeur battant, l'épée à la main, la peur au ventre, les yeux fouillant les brumes du matin désespérément pour comprendre ce qui se passait. (...)
Au fur et à mesure que nous approchons, nous nous faisons de plus en plus silencieux, même Rude et Pigeon restent cois. De l'extérieur du domaine, nous percevonspetitàpetitles détails de cette bâtisse. Ici, les vents restent calmes, comme à l'affût, je reconnais les murs en pierre bleue, marqués de sigle ancien en jade bleu, les toits presque translucides, bleus, et éclatants. Le jour suivant, nous arrivons. (...)
Je n'ai pas le temps de bouger, une flèche se plante dans mon épaule, je tourbillonne et tombe au sol, deux autres flèches suivent de très près. Aucune ne me touche. Un vrai miracle. Pigeon se rue vers le bois, je découvre à quel point lepetithomme court vite, mais il n'atteint pas les frondaisons. Trois flèches l'étendent net. L'une d'elle directement à l'arrière du crâne. (...)
J'ai quelques jours devant moi, guère plus. Je me serais donné plus longtemps, mais j'ai plongé dans unpetitlac dans le domaine du Seigneur des Hauts Vents pour échapper aux chiens et effacer mon odeur. (...)
Le sang coulait à flot et il savait que c'était fini. Caillou a ouvert la bouche et levé la main, mais c'est Regard Vif qui a parlé en premier : - Allezpetit, la justice, jusqu'au bout. J'ai croisé le regard dur de Regard Vif. Je me suis assis sur le ventre de Sillon, bloqué ses bras avec mes jambes, et d'un coup sec, j'ai planté mon couteau dans son crâne, il est mort les yeux grand ouvert. (...)
J'observe des hommes s'entraîner à l'épée et à l'arc, des femmes faire la lessive et élever des enfants. Leurs vie n'est finalement pas si différente de celle au village. Mon épaule se rétablitpetitàpetit, mais ma blessure au flanc est toujours douloureuse. Mes fièvres nocturnes s'espacent. Mahe et Jaï prétendent que j'ai de la chance et une santé de fer. (...)
J'ai déchiré un drap pour l'envelopper et arrêté le saignement, mais mon bras dégouline à travers et le tissu est littéralement imbibé de sang. Curieusement, depuis mon combat, ma hanche me fait moins mal. La lumière émanant de moi s'étiolepetitàpetit, finit par s'éteindre, mais je peux sentir le fleuve d'énergie capter la vie autour de moi, enfler, en un processus lent et inéluctable. Un instant, j'ai peur d'exploser, mais finalement, il se stabilise et n'enfle plus. (...)
Le soleil est tombé puis a émergé à nouveau depuis mon combat avec le Héraut, il l'a fait à nouveau lorsque j'ai atteint cepetitbois de bouleaux et de buissons chiches. Je suis un Anathème. Pourquoi ? Si seulement c'était arrivé au Trône de glace ! (...)
Je pourrais laisser le flot d'énergie continuer d'alimenter mes gestes, je le sens, mais j'ai peur des conséquences. La nuit tombe doucement sur cepetitbois perdu au fond de la steppe. On dit que lorsqu'un homme arrive au bout du monde, là où les rêves et les cauchemars deviennent les réalités hantées par le Beau Peuple, il ressent de plus en plus le besoin de continuer, et il devient. (...)
- Merci. La bête se traîne humblement jusqu'à moi. Je me nourris d'un repas délicieux autant qu'étrange, depetitlapin à six pattes ailés dont le goût m'évoque celui du poulet. Aewyll se fait toute petite, me rappelle un souvenir d'une petite fille que j'ai connu étant gosse, morte d'une fièvre. (...)
Je reprend mon souffle, le pouvoir vibre encore en moi, ricoche sans fin : Je saute à nouveau vers le haut, mais lorsque mon bond perd de sa puissance et que je ralentis, je me retiens de mes deux pieds sur un bout de roche irrégulier qui émerge de la paroi, et d'une poussée, me jette vers la paroi voisine, j'accomplis une culbute dans les airs sans difficulté, malgré Aewyll toujours dans mon dos, et me réceptionne sur mes deux pieds, creusant unpetitcratère dans le mur lors de l'impact. Au milieu de la pluie de roche, je saute et fonce vers un autre rocher en amont qui semble dépasser de la paroi. (...)
Il ne pourrait pas grand-chose contre moi, ils ne valaient même pas des types comme Chien Enragés, mais je n'ai pas envie de déclencher un massacre. Il y a unpetitrocher près du sommet de la colline, je m'y glisse et j'attends tout en espérant qu'ils n'ont rien changés à leurs mauvaises habitudes. (...)
Je n'hésite pas, je m'en saisis le plus silencieusement et rapidement possible. Le temps de m'habiller, les sentinelles reviennent. Je me fais toutpetit. Je prie les dieux qu'ils n'aperçoivent pas que le linge a disparu, je prie pour les hommes du village : ils n'auraient aucune chance. (...)
Plus le temps de faire dans la finesse : Je prends le pain, une gourde, un gros morceau de viande salée sous mes bras, et unpetitgâteau sec dans ma bouche, et me rue au dehors. Immédiatement derrière moi, j'entends les sentinelles crier, déjà toutes proches. (...)
Je me concentre et relâche le pouvoir au moment de l'impact, et il arrive tard, très tard. Je tombe de si haut que ma chute creuse unpetitcratère dans le sol, le rugissement de l'impact m'assourdit, et la main du dieu fou s'abat sur moi, je suis aveuglé un instant mais je ne panique pas. (...)
Je prends quelques plaies, quelques bosses, mes vêtements sont déchirés et ma gourde se brise, mais dans l'ensemble, je suis indemne et j'avance sans répit,petitàpetit. L'herbe et le sol ont entièrement disparut sous la terre et la poussière, moi-même je manque d'être enterré plus d'une fois par la poussière. Mais le fleuve du pouvoir est là, et je m'y accroche obstinément, sans faillir, et j'apprends que le pouvoir ne me faillit pas tant que ma volonté n'échoue pas elle-même. (...)
L'endroit est un véritable labyrinthe de de couloirs et de pièces, admirablement chauffé et entretenu, et visiblement bâti pour perdre rapidement toute personne ignorant la configuration des lieux, un véritablepetitmonde parallèle au sein même du Trône d'Orage. Les rares domestiques que je croise encore, c'est-à-dire trois, me fuient en hurlant avant même de me voir, prévenus de loin par la lumière d'aurore qui m'annonce, sauf un pauvrepetitvieux, qui me tombe dessus par hasard, si effrayé qu'il meurt de peur, la main crispée sur sa poitrine. Dans les murs, j'entends le chaos que cause mon arrivée au sein du Trône d'Orage : des gens courent, hurlent de peur ou des ordres, et tout ce bruit transpire et résonne de façon sourde et étouffée dans les couloirs, comme le prélude à un cataclysme. (...)
Sans réfléchir, je me redresse et bondit à une vitesse démentielle vers la porte du fond libérant tout le pouvoir possible dans une explosion de lumière humiliant celle de monpetitenfer personnel. C'est une porte de bois en chêne, épaisse de dix bon centimètre et renforcée d'une armature métallique : lorsque je libère le pouvoir à l'impact, elle explose comme du verre, projetant un millier d'échardes de bois et d'acier sur les gardes qui attendent ma mort dans le couloir. (...)