Histoire de Marin : Prise d'un Convoi Espagnol
Le brouhaha de la salle enfumée de l'auberge du Rat qui Pète fait lentement place au silence le plus complet. Tous les regards se tournent vers le vieil homme, maigre et ratatiné, qui se tient debout au comptoir. Son visage rouge de chaleur est marqué par des années d'une consommation immodérée de rhum. Comme s'il ignorait être au centre de l'attention, le vieil homme sort sa corde de tabac, qu'il mord pour en retirer une chique énorme. « Sang du diable, te fais pas prier, vieux Ben. Tu la racontes ...Contient : petit (7)(...) « Le diable m'emporte si je ne t'écrase ton foutu nez imbibé de rhum, Ben, je disais juste que je m'demande comment le capitaine compte s'y prendre. T'as de la chance que je ne cogne pas les débris. » Unpetitsourire de sa part comme de la mienne, et tout est dit. C'est foutrement beau l'amitié ! On attend que la nuit tombe, tout en suivant de très loin le convoi. (...)
Comme le convoi s'était assez distendu pendant la nuit, le temps qu'il rapplique, nous avons largement le temps de simuler une prise du navire pirate et de hisser les pavillons indiquant notre victoire. Le Pélican, beaucoup pluspetitque le Libertad, est attaché en allège à la poupe du Libertad, toutes voiles carguées, pour se présenter comme un navire tout à fait inoffensif. (...)
Dans un hourra général pour notre capitaine, les hommes se précipitent sur les haubans. Il faut dire que le franc-bord de notre galiotte était bienpetitpar rapport à celui de la frégate, si bien que pour accéder au pont ennemi, mieux valait se servir des vergues de grand-voile comme passerelles. Je monte aux côtés dupetitLabotte, qui nous avait rejoint à peine un mois plus tôt. Il hurle de rire tellement les Espagnol se sont fait avoir par le stratagème. (...)
Je me retourne tout en grimpant comme un singe, malgré mes 64 piges et je vois un pierrier à piston dirigé vers nous. Je crie aupetitde s'écarter tout en me laissant tomber pour éviter le boulet, mais le coup de canon couvre ma voix. (...)
Ah, ce gars-là, il est comme par hasard toujours là quand il faut ! Je me raccroche aux enfléchures et je manque de tomber en glissant sur le sang dupetit, mais je peux vous dire que je ne suis pas le dernier sur la hune. J'en oublie presque que je ne suis plus gabier depuis l'âge de trente quatre ans, c'est-à-dire depuis trente ans. (...)
Gérard, les yeux rouges et écarquillés par la vue du sang, s'arrête près de moi pour me chuchoter à l'oreille : « Alors Ben, on a les foies, tu peux toujours plonger et rentrer chez ta mère à la nage ». Puis il s'élance sur la vergue depetithunier en hurlant de rire. « Ma mère, elle est en enfer, et tu vas pas tarder à la rejoindre. Place au troisième âge ! (...)