Divin
sur Le Ludiste
Une nouvelle publiée dans feu le Fanzine Odyssées n°1. Ils avaient fait une longue route solitaire avant que le hasard ne les réunisse. Ils venaient des quatre coins du continent, si disparates que leur association avait quelque chose de grotesque et d'inquiétant à la fois. Les passants, en les voyant arriver, préféraient s'écarter. Les plus fous ou les plus hardis les observaient à la dérobée, se demandant combien de temps s'écoulerait avant que l'un d'entre ne sorte son arme pour abattre ses ...Contient : yeux (11)(...) Ils n'avaient en commun que des vêtements de voyage fatigués et une étrange lueur fixe et maniaque dans le regard : l'éclat desyeuxde ceux que rien, pas même la mort, ne détournera de leur objectif. Toujours en tête, venait un barbare du nord, vantard, soiffard et braillard. (...)
Son manque de savoir vivre faisait de lui un compagnon pénible, et si ses nombreux atouages, ses fourrures et sa monture sauvage impressionnaient les paysans, c'était sesyeuxrougeoyants qui imposaient le respect aux autres. Il était le plus grand, sans doute le lus puissant physiquement des cinq, mais son sourire hilare dénotait, souvent, du visage fermé et résolu de ceux qui le suivaient. (...)
Le second tenait plus de l'animal et devant lui les enfants s'enfuyaient en hurlant. Ses cheveux roux étaient clairsemés, son front fuyant et sesyeuxinjectés de sang profondément enfoncés dans leurs orbites. Sa mâchoire était énorme, difforme même. (...)
Le jeune garçon recula d'un pas, effrayé. Le chevalier se racla la gorge inconsciemment. L'homme du désert plissa lesyeuxet serra les dents. L'homme-bête ne fit rien d'abord, puis il passa sa langue sur ses lèvres comme s'il recherchait un goût depuis longtemps oublié en continuant son observation, le regard vide. (...)
Ils regardaient un couple sur un destrier descendant le flanc d'une haute colline, tandis que le soleil couchant, derrière, leur faisait cligner lesyeux. La piste venait jusqu'à eux et ils ne tarderaient pas à les rencontrer. Le destrier était un puissant étalon de guerre, noir, caparaçonné d'argent mais son harnachement, autrefois riche et brillant, était terni et maculé. (...)
Le nez aquilin, typique du peuple de l'aride pays occidental, donnait une direction nette, un air terrible, la preuve impossible à dissimuler d'un caractère implacable, celui d'un peuple habitué au commandement. Le menton fin et aristocratique confirmait l'impression faite part le front intelligent mais desyeux, étranges et inhumains, déroutaient l'observateur le plus attentif. Cesyeuxsemblaient d'un gris variant entre celui du ciel d'orage et celui de l'acier trempé, les pupilles avaient une forme presque féline et s'adaptaient rapidement à la lumière suivant leur position au soleil. C'est souvent à ce moment, qu'en fuyant ce regard insoutenable, on apercevait les oreilles, toutes à fait inhumaines elles aussi : noires et longues, les lobes chargés de boucles d'argent raffinées et primitives. (...)
Quelque chose de terrible et vicieux émanait de cette arme, comme si une mort douloureuse irradiait sans discontinuité vers tous les êtres vivants des alentours. La jeune femme frissonna et détourna lesyeuxen l'apercevant. Le cavalier avait observé les présentations et les défis traditionnels calmement. (...)
Il eut un petit rire moqueur et craintif à la fois, presque bouffon pour qui ne le connaissait pas. L'iris de sesyeuxbrillait d'une fièvre maligne, le coin de sa pommette se contractait par moment d'un tic d'excitation. (...)
Celui-ci roula prestement comme un chat qui retombe toujours sur ses pattes. Sur son visage était plaqué un sourire féroce. Une exaltation cruelle brillait dans sesyeux. Il prit son épée à deux mains dans un mouvement tournoyant qui projeta de la base de son poignet une grande salve de sang vermillon. (...)
Comment vivras-tu avec l'idée d'avoir tué une innocente ? Le jeune garçon tremblait et hésitait, sesyeuxrougissaient. Un sourd monologue intérieur semblait l'animer. Puis en un seul moment, son visage devint décidé et ferme, il dit, dans une voix bizarre, mécanique : - Oui, je n'hésiterai pas. (...)