Le Journal de Lycia (Premières chroniques) - Mandor
Mandor nous attendait dans une salle plus humaine que la précédente, beaucoup moins déstabilisante pour moi, à l'exception des mets peut-être. L'ambiance dégagée par le salon fleurait ces agréables soirées entre intimes où parfois le jeu des fausses confidences mène plus loin que prévu. Et bien que j'en aie pris conscience, j'en subissais malgré moi le charme. J'avais redouté ce dîner, car sans l'aval préalable de Flora nous devions surveiller nos moindres mots. Mais Mandor orienta les politesses ...Contient : neige (6)(...) Une partie de moi se laissait aller aux sensations engendrées par les mets fins et une compagnie agréable ; l'autre, plus raisonnée, récapitulait le contenu de la conversation et s'inquiétait déjà du meilleur moyen d'informer le Roi que son auguste fils avait probablement laissé échapper une information d'importance. Bien loin de tout cela, la mine triste, Robin ressassait probablement les paroles de Mandor surNeigeet sa prétendue complicité avec un dénommé Despil. Cette soirée ne prenait pas le tour idéal que j'avais malgré moi imaginé, pourquoi ne pas en profiter pour remonter un peu le moral du jeune héritier ! (...)
Avant que nous n'ayons échangé plus que des politesses, un couple apparut soudainement sur le sable, à quelques mètres de nous.Neige, élégamment vêtue pour une fois, était accompagnée d'un homme dont les traits me semblèrent familiers. Comme il saluait le maître des lieux, le jeune galant si empressé auprès deNeigenous fut présenté comme Despil, un autre frère de Mandor. Sous le regard mi-colérique mi-renfrogné de Robin, il offrit un siège àNeige, marquant ainsi le début d'une soirée qui aurait pu être agréable. Malheureusement, la tension palpable de Robin à mes côtés ternissait le plaisir de la conversation et le ton monta progressivement entre les deux soupirants. (...)
Si bien que parvenu au dessert, à défaut d'un gant, Robin jeta sa serviette au visage de Despil. Robin paraissait plus triste que furieux, aussi accepta-t-il un simple duel au premier sang.Neigesilencieuse jouait les jeunes vierges inquiètes mais une lueur dans son regard trahissait assez son plaisir de voir deux jeunes hommes s'affronter ainsi tacitement pour elle. (...)
Celui-ci se détourna sans un mot pour son vainqueur, puis requit de Mandor la permission de se retirer. Nous l'imitâmes bientôt : après cet acte de 'bravoure' Robin etNeigesemblaient sur le point de ce réconcilier, et si j'avais bien saisi les demi-mots de Mandor durant le dîner, nous nous retrouverions probablement tous deux pour le café. (...)