Voyage au Centre de la Terre
sur Les Ludopathes
Contient : siècles (13)(...) Quelques tronçons de basalte, arrachés par les fureurs de l'Océan, s'allongeaient sur le sol comme les débris d'un temple antique, ruines éternellement jeunes, sur lesquelles passaient lessièclessans les entamer. Telle était la dernière étape de notre voyage terrestre. Hans nous y avait conduits avec intelligence, et je me rassurais un peu en songeant qu'il devait nous accompagner encore. (...)
Ainsi se formèrent ces immenses couches de charbon qu'une consommation excessive doit, pourtant, épuiser en moins de troissiècles, si les peuples industriels n'y prennent garde. Ces réflexions me revenaient à l'esprit pendant que je considérais les richesses houillères accumulées dans cette portion du massif terrestre. (...)
La densité des couches d'air n'accroît même pas sa vitesse ; elle n'augmente que son intensité. Quelques secondes, dessiècles, se passèrent, et enfin ces paroles arrivèrent à mon oreille. « Axel, Axel ! est-ce toi ? » « Oui ! (...)
Voilà toute la flore de la seconde époque du monde, de l'époque de transition. Voilà ces humbles plantes de nos jardins qui se faisaient arbres aux premierssièclesdu globe ! Regarde, Axel, admire ! Jamais botaniste ne s'est trouvé à pareille fête ! - Vous avez raison, mon oncle. (...)
Quelle force naturelle pouvait produire de telles plantes, et quel devait être l'aspect de la terre aux premierssièclesde sa formation, quand, sous l'action de la chaleur et de l'humidité, le règne végétal se développait seul à sa surface ! (...)
Mon oncle ne s'y trompe pas, car, après un assez court examen, il dit : « Ce poisson appartient à une famille éteinte depuis dessiècleset dont on retrouve des traces fossiles dans le terrain dévonien. - Comment ! dis-je, nous aurions pu prendre vivant un de ces habitants des mers primitives ? (...)
Je passe comme une ombre au milieu des fougères arborescentes, foulant de mon pas incertain les marnes irisées et les grès bigarrés du sol ; je m'appuie au tronc des conifères immenses ; je me couche à l'ombre des Sphenophylles, des Asterophylles et des Lycopodes hauts de cent pieds. Lessiècless'écoulent comme des jours ! Je remonte la série des transformations terrestres. Les plantes disparaissent ; les roches granitiques perdent leur dureté ; l'état liquide va remplacer l'état solide sous l'action d'une chaleur plus intense ; les eaux courent à la surface du globe ; elles bouillonnent, elles se volatilisent ; les vapeurs enveloppent la terre, qui peu à peu ne forme plus qu'une masse gazeuse, portée au rouge blanc, grosse comme le soleil et brillante comme lui ! (...)
Je frissonne à l'évocation que je fais de ces monstres. Nul oeil humain ne les a vus vivants. Ils apparurent sur la terre millesièclesavant l'homme, mais leurs ossements fossiles, retrouvés dans ce calcaire argileux que les Anglais nomment le lias, ont permis de les reconstruire anatomiquement et de connaître leur colossale conformation. (...)
Le mât et la voile sont partis tout d'un bloc, et je les ai vus s'enlever à une prodigieuse hauteur, semblables au ptérodactyle, cet oiseau fantastique des premierssiècles. Nous sommes glacés d'effroi. La boule mi-partie blanche, mipartie azurée, de la grosseur d'une bombe de dix pouces, se promène lentement, en tournant avec une surprenante vitesse sous la lanière de l'ouragan. (...)
Nous avancions difficilement sur ces cassures de granit, mélangées de silex, de quartz et de dépôts alluvionnaires, lorsqu'un champ, plus qu'un champ, une plaine d'ossements apparut à nos regards. On eût dit un cimetière immense, où les générations de vingtsièclesconfondaient leur éternelle poussière. De hautes extumescences de débris s'étageaient au loin. (...)
Ces débris, il est vrai, n'étaient point des ossements de l'homme, mais seulement des objets de son industrie, des tibias, des fémurs d'animaux fossiles, striés régulièrement, sculptés pour ainsi dire, et qui portaient la marque d'un travail humain. Ainsi, d'un bond, l'homme remontait l'échelle des temps d'un grand nombre desiècles; il précédait le mastodonde ; il devenait le contemporain de « l'elephas meridionalis » ; il avait cent mille ans d'existence, puisque c'est la date assignée par les géologues les plus renommés à la formation du terrain pliocène ! (...)
Un sol d'une nature particulière, comme celui du cimetière Saint-Michel, à Bordeaux, l'avait-il ainsi conservé pendant dessiècles? Je ne saurais le dire. Mais ce cadavre, la peau tendue et parcheminée, les membres encore moelleux, - à la vue du moins, - les dents intactes, la chevelure abondante, les ongles des doigts et des orteils d'une grandeur effrayante, se montrait à nos yeux tel qu'il avait vécu. (...)
s'écriait-il, tu n'as rien oublié de ce qui pouvait ouvrir à d'autres mortels les routes de l'écorce terrestre, et tes semblables peuvent retrouver les traces que tes pieds ont laissées, il y troissiècles, au fond de ces souterrains obscurs ! A d'autres regards que les tiens, tu as réservé la contemplation de ces merveilles ! (...)Jules Verne. Édition du groupe « Ebooks libres et gratuits ». I - Le 24 mai 1863, un dimanche, mon oncle, le professeur Lidenbrock, revint précipitamment vers sa petite maison située au numéro 19 de Königstrasse, l'une des plus anciennes rues du vieux quartier de Hambourg. La bonne Marthe dut se croire fort en retard, car le dîner commençait à peine à chanter sur le fourneau de la cuisine. « Bon, me dis-je, s'il a faim, mon oncle, qui est le plus impatient des ...