Voyage au Centre de la Terre
sur Les Ludopathes
Contient : sol (47)(...) Sa surface était composée d'une grande quantité de métaux, tels que le potassium, le sodium, qui ont la propriété de s'enflammer au seul contact de l'air et de l'eau ; ces métaux prirent feu quand les vapeurs atmosphériques se précipitèrent en pluie sur lesol, et peu à peu, lorsque les eaux pénétrèrent dans les fissures de l'écorce terrestre, elles déterminèrent de nouveaux incendies avec explosions et éruptions. (...)
» Puis, après m'avoir recommandé du geste un silence absolu, il descendit dans le canot qui l'attendait. Je le suivis, et bientôt nous foulions du pied lesolde l'Islande. Tout d'abord apparut un homme de bonne figure et revêtu d'un costume de général. Ce n'était cependant qu'un simple magistrat, le gouverneur de l'île, M. (...)
Je ne fus donc pas obligé de demander mon chemin, ce qui, dans la langue des gestes, expose à beaucoup de mécomptes. La ville s'allonge sur unsolassez bas et marécageux, entre deux collines. Une immense coulée de laves la couvre d'un côté et descend en rampes assez douces vers la mer. (...)
Les huttes des Islandais sont faites de terre et de tourbe, et leurs murs inclinés en dedans ; elles ressemblent à des toits posés sur lesol. Seulement ces toits sont des prairies relativement fécondes. Grâce à la chaleur de l'habitation, l'herbe y pousse avec assez de perfection, et on la fauche soigneusement à l'époque de la fenaison, sans quoi les animaux domestiques viendraient paître sur ces demeures verdoyantes. (...)
Je ne pouvais m'empêcher de sourire en le voyant si grand sur son petit cheval, et, comme ses longues jambes rasaient lesol, il ressemblait à un centaure à six pieds. « Bonne bête ! bonne bête ! disait-il. Tu verras, Axel, que pas un animal ne l'emporte en intelligence sur le cheval islandais ; neiges, tempêtes, chemins impraticables, rochers, glaciers, rien ne l'arrête. (...)
Mon oncle, à la taille duquel on n'avait pas songé en bâtissant la maison, ne manqua pas de donner trois ou quatre fois de la tête contre les saillies du plafond. On nous introduisit dans notre chambre, sorte de grande salle avec unsolde terre battue et éclairée d'une fenêtre dont les vitres étaient faites de membranes de mouton assez peu transparentes. (...)
Le lendemain, à cinq heures, nous faisions nos adieux au paysan islandais ; mon oncle eut beaucoup de peine à lui faire accepter une rémunération convenable, et Hans donna le signal du départ. A cent pas de Gardär, le terrain commença à changer d'aspect ; lesoldevint marécageux et moins favorable à la marche. Sur la droite, la série des montagnes se prolongeait indéfiniment comme un immense système de fortifications naturelles, dont nous suivions la contrescarpe : souvent des ruisseaux se présentaient à franchir qu'il fallait nécessairement passer à gué et sans trop mouiller les bagages. (...)
Le soir, après avoir coupé à gué deux rivières riches en truites et en brochets, l'Alfa et l'Heta, nous fûmes obligés de passer la nuit dans une masure abandonnée, digne d'être hantée par tous les lutins de la mythologie scandinave ; à coup sûr le génie du froid y avait élu domicile, et il fît des siennes pendant toute la nuit. La journée suivante ne présenta aucun incident particulier. Toujours mêmesolmarécageux, même uniformité, même physionomie triste. Le soir, nous avions franchi la moitié de la distance à parcourir, et nous couchions à « l'annexia » de Krösolbt. (...)
Le 19 juin, pendant un mille environ, un terrain de lave s'étendit sous nos pieds ; cette disposition dusolest appelée « hraun » dans le pays : la lave ridée à la surface affectait des formes de câbles tantôt allongés, tantôt roulés sur eux-mêmes ; une immense coulée descendait des montagnes voisines, volcans actuellement éteints, mais dont ces débris attestaient la violence passée. (...)
Cependant quelques fumées de source chaudes rampaient ça et là. Le temps nous manquait pour observer ces phénomènes ; il fallait marcher ; bientôt lesolmarécageux reparut sous le pied de nos montures ; de petits lacs l'entrecoupaient. Notre direction était alors à l'ouest ; nous avions en effet tourné la grande baie de Faxa, et la double cime blanche du Sneffels se dressait dans les nuages à moins de cinq milles. Les chevaux marchaient bien ; les difficultés dusolne les arrêtaient pas ; pour mon compte, je commençais à devenir très fatigué ; mon oncle demeurait ferme et droit comme au premier jour ; je ne pouvais m'empêcher de l'admirer à l'égal du chasseur, qui regardait cette expédition comme une simple promenade. (...)
Mais mon oncle, qui n'avait rien à refaire, ne l'entendait pas ainsi, et le lendemain il fallut enfourcher de nouveau nos bonnes bêtes. Lesolse ressentait du voisinage de la montagne dont les racines de granit sortaient de terre, comme celles d'un vieux chêne. (...)
A de certains intervalles, et sous cet impluvium naturel, l'oeil surprenait des ouvertures ogivales d'un dessin admirable, à travers lesquelles les flots du large venaient se précipiter en écumant. Quelques tronçons de basalte, arrachés par les fureurs de l'Océan, s'allongeaient sur lesolcomme les débris d'un temple antique, ruines éternellement jeunes, sur lesquelles passaient les siècles sans les entamer. (...)
D'autres l'ont fait qui n'en sont pas morts. Mais ce n'est pas tout. S'il se présente un chemin pour descendre dans les entrailles dusol, si ce malencontreux Saknussemm a dit vrai, nous allons nous perdre au milieu des galeries souterraines du volcan. (...)
Or les éruptions sont toujours précédées par des phénomènes parfaitement connus ; j'ai donc interrogé les habitants du pays, j'ai étudié lesol, et je puis te le dire, Axel, il n'y aura pas d'éruption. » A cette affirmation je restai stupéfait, et je ne pus répliquer. (...)
Je voyais ça et là des fumerolles monter dans les airs ; ces vapeurs blanches nommées « reykir » en langue islandaise, venaient des sources thermales, et elles indiquaient, par leur violence, l'activité volcanique dusol. Cela me paraissait justifier mes craintes. Aussi je tombai de mon haut quand mon oncle me dit : « Tu vois toutes ces fumées, Axel ; eh bien, elles prouvent que nous n'avons rien à redouter des fureurs du volcan ! (...)
Toute conversation devenait donc à peu près impossible. Au delà de la muraille basaltique du fjord de Stapi, se présenta d'abord unsolde tourbe herbacée et fibreuse, résidu de l'antique végétation des marécages de la presqu'île ; la masse de ce combustible encore inexploité suffirait à chauffer pendant un siècle toute la population de l'Islande ; cette vaste tourbière, mesurée du fond de certains ravins, avait souvent soixante-dix pieds de haut et présentait des couches successives de détritus carbonisés, séparées par des feuillets de tuf ponceux. (...)
Donc, dans ce cas, la théorie de Humphry Davy, le document de Saknussemm, les prétentions de mon oncle, tout s'en allait en fumée. Cette hypothèse me conduisit à examiner attentivement la nature dusol, et je me rendis bientôt compte de la succession des phénomènes qui présidèrent à sa formation. L'Islande, absolument privée de terrain sédimentaire, se compose uniquement de tuf volcanique, c'est-à-dire d'un agglomérat de pierres et de roches d'une texture poreuse. (...)
Je me rassurais donc sur l'issue de notre entreprise, tout en marchant à l'assaut du Sneffels. La route devenait de plus en plus difficile ; lesolmontait ; les éclats de roches s'ébranlaient, et il fallait la plus scrupuleuse attention pour éviter des chutes dangereuses. (...)
Certaines parties du cône formaient des glaciers intérieurs. Hans ne s'avançait alors qu'avec une extrême précaution, sondant lesolde son bâton ferré pour y découvrir les crevasses. A de certains passages douteux, il devint nécessaire de nous lier par une longue corde, afin que celui auquel le pied viendrait à manquer inopinément se trouvât soutenu par ses compagnons. (...)
Chaque monticule, chaque roc, chaque pierre, chaque aspérité eut part à sa bienfaisante effluve et projeta instantanément son ombre sur lesol. Entre toutes, celle du Scartaris se dessina comme une vive arête et se mit à tourner insensiblement vers l'astre radieux. (...)
Mais le professeur, sans doute, fit ses observations ou prit ses notes, car, à l'une des haltes, il me dit : « Plus je vais, plus j'ai confiance ; la disposition de ces terrains volcaniques donne absolument raison à la théorie de Davy. Nous sommes en pleinsolprimordial,soldans lequel s'est produit l'opération chimique des métaux enflammés au contact de l'air et de l'eau ; je repousse absolument le système d'une chaleur centrale ; d'ailleurs, nous verrons bien. » Toujours la même conclusion. (...)
Nous ne sommes pas encore entrés d'un pouce dans les entrailles de la terre ? - Que voulez-vous dire ? - Je veux dire que nous avons atteint seulement lesolde l'île ! Ce long tube vertical, qui aboutit au cratère du Sneffels, s'arrête à peu près au niveau de la mer. (...)
Cela devait être, car, à l'époque silurienne, les mers renfermaient plus de quinze cents espèces végétales ou animales. Mes pieds, habitués ausoldur des laves, foulèrent tout à coup une poussière faite de débris de plantes et de coquille. Sur les parois se voyaient distinctement des empreintes de fucus et de lycopodes ; le professeur Lidenbrock ne pouvait s'y tromper ; mais il fermait les yeux, j'imagine, et continuait son chemin d'un pas invariable. (...)
Enfin, le mardi, 8 juillet, en nous traînant sur les genoux, sur les mains, nous arrivâmes à demi morts au point de jonction des deux galeries. Là je demeurai comme une masse inerte, étendu sur lesolde lave. Il était dix heures du matin. Hans et mon oncle, accotés à la paroi, essayèrent de grignoter quelques morceaux de biscuit. (...)
Le couloir actuel était une fissure de ce genre, par laquelle s'épanchait autrefois le granit éruptif. Ses mille détours formaient un inextricable labyrinthe à travers lesolprimordial. A mesure que nous descendions, la succession des couches composant le terrain primitif apparaissait avec plus de netteté. (...)
Je compris qu'il cherchait le point précis où le torrent se faisait entendre plus bruyamment. Ce point, il le rencontra dans la paroi latérale de gauche, à trois pieds au-dessus dusol. Combien j'étais ému ! Je n'osais deviner ce que voulait faire le chasseur ! Mais il fallut bien le comprendre et l'applaudir, et le presser de mes caresses, quand je le vis saisir son pic pour attaquer la roche elle-même. (...)
En notre qualité de fossiles, nous faisions fi de ces inutiles merveilles. La grotte formait une vaste salle. Sur sonsolgranitique coulait doucement le ruisseau fidèle. A une pareille distance de sa source, son eau n'avait plus que la température ambiante et se laissait boire sans difficulté. (...)
J'étais enterré vif, avec la perspective de mourir dans les tortures de la faim et de la soif. Machinalement je promenai mes mains brûlantes sur lesol. Que ce roc me sembla desséché ! Mais comment avais-je abandonné le cours du ruisseau ? Car, enfin, il n'était plus là ! (...)
Ma couchette, faite de toutes les couvertures de voyage, se trouvait installée dans une grotte charmante, ornée de magnifiques stalagmites, dont lesolétait recouvert d'un sable fin. Il y régnait une demi-obscurité. Aucune torche, aucune lampe n'était allumée, et cependant certaines clartés inexplicables venaient du dehors en pénétrant par une étroite ouverture de la grotte. (...)
- Une ménagerie ! - Oui, sans doute. Vois cette poussière que nous foulons aux pieds, ces ossements épars sur lesol. - Des ossements ! m'écriai-je. Oui, des ossements d'animaux antédiluviens ! » Je m'étais précipité sur ces débris séculaires faits d'une substance minérale indestructible8. (...)
A une certaine époque, la terre n'était formée que d'une écorce élastique, soumise à des mouvements alternatifs de haut et de bas, en vertu des lois de l'attraction. Il est probable que des affaissements dusolse sont produits, et qu'une partie des terrains sédimentaires a été entraînée au fond des gouffres subitement ouverts. (...)
A ma grande surprise, un radeau à demi terminé s'étendait sur le sable ; il était fait de poutres d'un bois particulier, et un grand nombre de madriers, de courbes, de couples de toute espèce, jonchaient littéralement lesol. Il y avait là de quoi construire une marine entière. « Mon oncle, m'écriai-je, quel est ce bois ? (...)
Je passe comme une ombre au milieu des fougères arborescentes, foulant de mon pas incertain les marnes irisées et les grès bigarrés dusol; je m'appuie au tronc des conifères immenses ; je me couche à l'ombre des Sphenophylles, des Asterophylles et des Lycopodes hauts de cent pieds. (...)
Mon oncle me suit lestement, tandis que le chasseur demeure à son poste, comme un homme au-dessus de ces étonnements. Nous marchons sur un granit mêlé de tuf siliceux ; lesolfrissonne sous nos pieds comme les flancs d'une chaudière où se tord de la vapeur surchauffée ; il est brûlant. (...)
Elles avaient appartenu à ces gigantesques glyptodons de la période pliocène dont la tortue moderne n'ont plus qu'une petite réduction. En outre lesolétait semé d'une grande quantité de débris pierreux, sortes de galets arrondis par la lame et rangés en lignes successives. (...)
Qu'une ouverture quelconque existât, et il devenait important pour lui d'en faire sonder la profondeur. Pendant un mille, nous avions côtoyé les rivages de la mer Lidenbrock, quand lesolchangea subitement d'aspect. Il paraissait bouleversé, convulsionné par un exhaussement violent des couches inférieures. (...)
Boucher de Perthes les carrières de Moulin-Quignon, près Abbeville, dans le département de la Somme, en France, trouvèrent une mâchoire humaine à quatorze pieds au-dessous de la superficie dusol. C'était le premier fossile de cette espèce ramené à la lumière du grand jour. Près de lui se rencontrèrent des haches de pierre et des silex taillés, colorés et revêtus par le temps d'une patine uniforme. (...)
On comprendra donc les stupéfactions et les joies de mon oncle, surtout quand, vingt pas plus loin, il se trouva en présence, on peut dire face à face, avec un des spécimens de l'homme quaternaire. C'était un corps humain absolument reconnaissable. Unsold'une nature particulière, comme celui du cimetière Saint-Michel, à Bordeaux, l'avait-il ainsi conservé pendant des siècles ? (...)
Mais une question grave se présentait, que nous n'osions résoudre. Ces êtres animés avaient-ils glissé par une convulsion dusolvers les rivages de la mer Lidenbrock, alors qu'ils étaient déjà réduits en poussière ? Ou plutôt vécurent-ils ici, dans ce monde souterrain, sous ce ciel factice, naissant et mourant comme les habitants de la terre ? (...)
De grands palmiers, d'espèces aujourd'hui disparues, de superbes palmacites, des pins, des ifs, des cyprès, des thuyas, représentaient la famille des conifères, et se reliaient entre eux par un réseau de lianes inextricables. Un tapis de mousses et d'hépatiques revêtait moelleusement lesol. Quelques ruisseaux murmuraient sous ces ombrages, peu dignes de ce nom, puisqu'ils ne produiraient pas d'ombre. (...)
Instinctivement, nous revenions vers la mer Lidenbrock, et je ne sais dans quelles divagations mon esprit se fût emporté, sans une préoccupation qui me ramena à des observations plus pratiques. Bien que je fusse certain de fouler unsolentièrement vierge de nos pas, j'apercevais souvent des agrégations de rochers dont la forme rappelait ceux de Port-Graüben. (...)
L'orifice, à peu près circulaire, présentait un diamètre de cinq pieds environ ; le sombre tunnel était taillé dans le roc vif et soigneusement alésé par les matières éruptives auxquelles il donnait autrefois passage ; sa partie inférieure affleurait lesol, de telle façon que l'on put y pénétrer sans aucune difficulté. Nous suivions un plan presque horizontal, quand, au bout de six pas, notre marche fut interrompue par l'interposition d'un bloc énorme. (...)
Hans porta la lumière de la lampe sur tous les points de la paroi ; mais celle-ci n'offrait aucune solution de continuité. Il fallait renoncer à tout espoir de passer. Je m'étais assis sur lesol; mon oncle arpentait le couloir à grands pas. « Mais alors Saknussemm ? m'écriai-je. - Oui, fit mon oncle, a-t-il donc été arrêté par cette porte de pierre ? (...)
Voyez, il y a des fissures récentes qui sillonnent ce plafond de granit ; il est fait de morceaux rapportés, de pierres énormes, comme si la main de quelque géant eût travaillé à cette substruction ; mais, un jour, la poussée a été plus forte, et ce bloc, semblable à une clef de voûte qui manque, a glissé jusqu'ausolen obstruant tout passage. Voilà un obstacle accidentel que Saknussemm n'a pas rencontré, et si nous ne le renversons pas, nous sommes indignes d'arriver au centre du monde ! (...)
Au delà du roc qui venait de sauter, il existait un abîme. L'explosion avait déterminé une sorte de tremblement de terre dans cesolcoupé de fissures, le gouffre s'était ouvert, et la mer, changée en torrent, nous y entraînait avec elle. (...)Jules Verne. Édition du groupe « Ebooks libres et gratuits ». I - Le 24 mai 1863, un dimanche, mon oncle, le professeur Lidenbrock, revint précipitamment vers sa petite maison située au numéro 19 de Königstrasse, l'une des plus anciennes rues du vieux quartier de Hambourg. La bonne Marthe dut se croire fort en retard, car le dîner commençait à peine à chanter sur le fourneau de la cuisine. « Bon, me dis-je, s'il a faim, mon oncle, qui est le plus impatient des ...