L'araignée de glace
sur Asmodée au format (159 Ko)
Medico, 1666. La tisseuse à la fourrure de velours bleu nuit avait élu domicile près de la grande fenêtre de la chambre. Immobile au milieu d'un piège semblable à un flocon de neige, elle guettait, patiente, les proies imprudentes qui finiraient immanquablement par se prendre dans ses rets. Le reflet d'un rayon de soleil joua quelques instants sur le pelage de la créature, la parant de l'éclat d'un saphir. Un papillon aux ailes multicolores se posa délicatement sur la toile, tenta de repartir ...Contient : homme (10)(...) Sandra fixa un court instant la nuque étroite, surmontée d'un chignon sévère celle qui croyait encore avoir tout pouvoir sur sa destinée, puis tourna son regard vers les trois personnes qui lui faisaient face. Au centre se tenait unhommed'une cinquantaine d'années, encore svelte et musclé, vêtu de riches étoffes ocres et brunes. Un peu en retrait, sur sa gauche, se trouvait son garde du corps, qui demeurait d'une rigidité de fer mais était attentif au moindre mouvement. (...)
Il lui sembla qu'il parvenait à deviner ses traits derrière la cascade de dentelles noires et elle ne put réprimer un mouvement de recul. Un léger sourire joua un instant sur les lèvres du jeunehomme, puis se dissipa au moment où la Clotho se tournait vers sa fille. « Ah ! Vous voici enfin, Sandra ! (...)
« Avez vous eu l'occasion d'écouter la Rosetta de Corradin, à l'opéra de la Felicita, mademoiselle ? » demanda le jeunehomme. Sa voix basse, grave et douce, était semblable à la caresse d'un chat. Sandra releva la tête, croisa une fois de plus son regard et s'apprêtait à répondre lorsque sa mère l'interrompit : « Sandra ne va pas dans le monde. (...)
Pendant que son père et la Strega finissaient leur discussion, tout en se dirigeant vers les jardins du palazzo, le jeunehommes'arrangea pour rester quelques minutes, seul, avec Sandra. La jeune femme n'avait pas bougé de son fauteuil, aussi froide et immobile qu'une statue. (...)
» Une silhouette se dessinait, montée sur un destrier couleur cobalt. « Il a croisé mes yeux, m'a souri. Je n'ai pu m'empêcher de chercher à savoir qui était ce jeunehommeet, en me renseignant, j'ai appris qu'il s'agissait de Flavio Rienzi de Medico, dont la famille est connue dans toute la principauté pour la beauté de ses oeuvres en verre soufflé. (...)
Encore quelques heures et le destin de la Strega serait à jamais scellé. Condamnée à vivre aux côtés d'unhommequ'elle aimerait éperdument et sur lequel elle n'aurait jamais aucun pouvoir, Sandra passerait le restant de ses jours, enfermée derrière les murs d'un palazzo, à porter les enfants d'un époux tout-puissant et élever ceux que ses maîtresses lui auraient donné. (...)
Le tintement de la clochette d'entrée le tira de ses pensées. Il se retourna et retint un mouvement de surprise. Devant lui, se tenait unhommed'une trentaine d'années, vêtu d'un riche pourpoint de soie bleue nuit et de velours noir, de chausses de cuir fin, portant une longue rapière ouvragée, marquée du sceau de la famille Falisci, au côté. (...)
Tout le monde attendait de voir ce qui allait se produire. La Araña était une femme insensible, capable de figer unhommed'un seul de ses regards marmoréens ou d'une remarque cuisante. Jusqu'à présent, nul n'avait osé mettre sa réputation en doute... mais cela pourrait changer bien des choses à l'avenir, si celle-ci avait été bâtie sur du vent. (...)
Il me déplairait d'être contrainte de verser le sang en ces lieux. Alors lâchez-moi et partez. » Ils s'affrontèrent quelques instants du regard ; l'hommefinit par baisser les yeux, desserra son étreinte et quitta l'auberge en lui lançant un coup d'oeil mauvais. (...)
« Iolanda de Chiarisa était une Strega demi-sang, dévorée par une inextinguible soif de pouvoir. Elle accepta d'épouser un comte parent des Falisci - unhommed'un certain âge déjà, alors qu'il y avait d'autres partis - et s'arrangea pour le faire disparaître, peu après la naissance de sa fille cadette, Léa. (...)