Joueur, qui es-tu ?
sur Bastion rôliste
Je demande maintenant à tous les joueurs de faire un pas en arrière (attention de ne pas vous péter la gueule) et de regarder leur carrière . A priori vous êtes passé par les stades suivants : - Tout d'abord, la Découverte. Souvent faite sur un jeu type AD&D, c'est l'illumination. On se demande comment on a fait pour vivre sans. On chérit son premier personnage, on est chaperonné par des aventuriers chevronnés qui vous conseillent ('Maintenant jette 1d20 pour ton S.S.... puis 1d100... Ah ! pas ...Contient : maître (11)(...) On recommence en essayant de faire mieux. Les autres joueurs étant déjà à un niveau d'expérience plus élevé, c'est avec compassion que lemaîtreaccepte que le personnage soit un peu gonflé, histoire de rester dans le coup... Un mot magique apparaît : Background. (...)
Souvent on commence à préférer un certain type de personnages qui vont devenir une seconde peau, un reflet. On joue très technique. En tant queMaîtrede jeu, on connaît sur le bout des doigts l'ensemble des règles d'un ou de plusieurs systèmes de jeu. (...)
Pour cela il faut être le plus fort, encore plus fort, toujours plus fort... Et alors le but devient le XP ou plus communément appelé Point d'expérience. Comme lemaîtreest généreux, il n'y a pas trop de problèmes. Les groupes d'aventuriers se forment, chacun y a sa place et est le meilleur dans son domaine : on n'apprécie guère les places de doublures. (...)
Les caractéristiques et les compétences atteignent des dimensions quasi... divines. Il n'y a plus de limite. Plus il y en a, plus il en faut. Plus il en faut, plus lemaîtreen donne. Il faut rester dans le coup. Mourir devient impensable... alors on ne meurt plus. Par contre les dieux, eux ils le peuvent et on le prouve... A l'appétit des joueurs répondent les talents culinaires dumaître. Aucun défi passé n'est à la hauteur. Alors on met la barre plus haute, toujours plus haute. Le champ de bataille n'a plus de limites : le monde ne suffit plus, heureusement il y a les autres dimensions. (...)
Le but n'est plus forcément de réussir l'aventure, mais de la vivre comme le personnage la vivrait. Lemaîtredécouvre le miracle de la description. Les sentiments et ce qu'éprouve le personnage se mêlent au jeu : d'abord le plus simple : le rire, le comique. (...)
Maintenant, si tous les joueurs sont de ce type, on aboutit à une parade du plus bel effet, mais d'un goût et d'une efficacité plutôt douteuse. D'un point de vuemaître, c'est la catastrophe. Les scénarios s'embourbent, on n'avance plus et lorsque, par miracle, une progression se fait enfin sentir, c'est dans la mauvaise direction. (...)
Pour ne rien arranger, la psychologie du personnage a tendance à se compliquer et à sortir des modèles type : on devient sombre, mystérieux et (ou) asocial. La tâche dumaîtredevient alors insurmontable : il est alors plus facile de jongler avec de la nitroglycérine que de gérer un groupe de solitaires ayant constamment des problèmes existentiels. Lemaîtrese retrouve alors devant un choix, une attitude à adopter pour pouvoir continuer son scénario ou sa campagne : il peut laisser faire. (...)
Ils ont alors l'impression d'étouffer, de ne pas pouvoir s'exprimer librement, de ne pas pouvoir 'jouer' leur rôle : la réaction de rejet est quasi immédiate. Lemaîtrepeut aussi décider de modifier son type de scénario afin que celui-ci corresponde aux envies des joueurs : toutes les histoires ont alors tendance à se centrer sur leurs vies, leurs backgrounds : ils deviennent le centre de leur univers, ce qui les flatte encore plus. Lemaîtredevient alors l'esclave de ses joueurs et ceux-ci en imposent toujours plus, encore plus... Voilà, je pense avoir, d'une manière presque impartiale, fait le tour des différentes phases que traversent les joueurs de JdR. (...)