Ciel et Terre
sur Chaodisiaque au format
Le maître du vent. Je m'appelle Ciel Noir. Je ne suis qu'un homme. Le sang qui coule dans mes veines n'est pas celui des dieux, ni celui des dragons, il me permet juste d'animer ce corps, de pousser cette charrue qui creuse son sillon pour m'offrir de quoi me faire vivre, de parler, et parfois, faire naître un sourire sur le visage de ma femme. Ce village est petit, si petit qu'il ne porte pas de nom, à peine une centaine de paysans l'animent, survivant avec moi, leurs âmes revêtues ...Contient : piégé, piège (6)(...) A la fin de la journée, lorsque j'émerge, je retombe sur la neige, et un peu plus loin, la craquelure large et sombre de la faille déchirant la terre.Piégé. Je fouille le monde autour de moi du regard : Personne. Nos ancêtres ont appelé cette chose la faille : et c'est bien ce que c'est, mais c'est un peu plus que cela : c'est une faille dans le monde des hommes, dans la Création tout entière. (...)
J‘aperçois parfois des surfaces gelées traversant l'énorme abysse, seul point de passage car le bois est entièrement cerné par la faille. L'impression depiègese renforce. Je ne me sens pas observé, mais cela ne veut pas dire grand-chose. J'ai l'impression d'être prisonnier d'un rêve étrange. (...)
- Je suis Lewellyn, Duc de la faille, reprend-t-il, puis-je savoir à qui ais-je l'honneur de m‘adresser ? Je grogne comme un animal pris aupiège. - Pourquoi ne m'a tu pas encore voler mon âme ? Il sourit. Ses yeux se lève vers les cieux, un haussement de sourcils, chacun de ses mouvements est l'élément parfait d'une danse merveilleuse et perpétuelle, un langage à part entière qui capture l'attention de celui qui le contemple dans la toile de sa grâce. (...)
Les paroles de Lewellyn dansent dans mon esprit, des paroles démentes mais qui possèdent un sens, et j'ignore si c'est parce qu'elles en ont effectivement un ou si c'est parce que je deviens fou, mais toute mon âme me hurle de sortir d'ici, de me dépêtrer de cepiègede beauté et de folie. Je tente d'être discret. J'essaie de relâcher le fleuve de pouvoir dans mes gestes comme lorsque je me bats, mais rien ne vient, et mes pas me donnent l'impression d'être assourdissants sur le sol de glace bleue, translucide et ornementée. (...)
Aewyll hoche la tête vers le bloc de glace, de la même façon doucement autoritaire que la Princesse Bleue. Je m'approche, redoute lepiège, mais il y a quelque chose derrière la neige qui recouvre la glace, dans la glace elle-même, quelque chose de vaguement familier. (...)
Sans voir vers où, je tends la main dans la direction du bruit, attrape une patte engoncée dans une chitine bleuâtre et la ramène vers moi brutalement. La chose s'agite dans tous les sens comme un chat pris aupiège, et elle glisse dans un nuage de poussière vers moi, cliquetant de surprise. Je sens ma main droite s'engourdir douloureusement dans un éclair glacé au contact de la carapace. (...)
Des ordres sont aboyés par dessus le vacarme des armes et des armures que l'on prépare, des portes claquent avec rage et précipitation, d'autres pas résonnent, couvrant le bruit du déluge qui tombe sur le trône, et tout cela converge vers moi. Aucun des gardes mortels ne peut m'arrêter, ils ont déjà essayé. Peut-être un nouveaupiègepeut-t-il réussir, mais rien n'est moins sûr, il leur faudra du temps pour le préparer, et je suis déjà dans l'enceinte principale. (...)