Ciel et Terre
sur Chaodisiaque au format
Le maître du vent. Je m'appelle Ciel Noir. Je ne suis qu'un homme. Le sang qui coule dans mes veines n'est pas celui des dieux, ni celui des dragons, il me permet juste d'animer ce corps, de pousser cette charrue qui creuse son sillon pour m'offrir de quoi me faire vivre, de parler, et parfois, faire naître un sourire sur le visage de ma femme. Ce village est petit, si petit qu'il ne porte pas de nom, à peine une centaine de paysans l'animent, survivant avec moi, leurs âmes revêtues ...Contient : tombe (21), tombé (2)(...) En dehors de nous-mêmes, nous n'avons pas d'amis. Comme toujours, à cette période de l'année, la nuittombetardivement. Lorsque le ciel vire au jaune, nous montons rapidement le camp autour du chariot. (...)
Dès que l'on a plus besoin de lui, Boeuf s'éloigne un peu et va s'asseoir. Nous faisons semblant de ne pas l'entendre pleurer. La nuittombelorsque je prépare le repas avec Rude Automne. Je suis affamé, la salive me monte à la bouche. (...)
Une flèche venue du rempart se plante dans la poitrine de l'ancien et l'envoie rouler dans la boue en jurant. Je n'ai pas le temps de bouger, une flèche se plante dans mon épaule, je tourbillonne ettombeau sol, deux autres flèches suivent de très près. Aucune ne me touche. Un vrai miracle. Pigeon se rue vers le bois, je découvre à quel point le petit homme court vite, mais il n'atteint pas les frondaisons. (...)
J'ai esquivé en plongeant en avant par dessus sa lame qui frappait trop bas, mon couteau trouva sa gorge, il bascula en arrière, et le choc de la chute fit s'enfoncer ma lame plus encore lorsque nous sommestombétout les deux dans la boue, étendus l'un sur l'autre. Lâchant son arme, il me repoussa sur le côté de ses bras pour me dégager avec ses dernières forces, mais il ne pouvait faire plus, et ses convulsions me rappelèrent celle d'un poisson en train de s'asphyxier hors de l'eau. (...)
Si vide que lorsque l‘on sort du chemin, on navigue à l'instinct et aux étoiles comme des marins perdus dans un océan vide. Le soirtombelorsqu'un grondement similaire à celui du tonnerre roulant dans la plaine m'avertit que la Princesse Bleue m'a retrouvé. (...)
L'onde de choc soulève un nuage de poussière autour de nous. Je disperse le nuage d'un geste du bras. Le silencetombesur le campement. Tous les regards se tournent vers moi, éblouis, terrifiés, incrédules. Certains s'enfuient déjà, mais pas le Héraut : Le halo d'or pâle rencontre la colère verte et haineuse de son oeil qui se déverse sur moi, cette haine étrange qui ne lui appartient pas plus que ne lui appartiennent les nuages. (...)
Il ne dure pas plus que l'ancien. Tonnerre de cris, pluie de flèches, éclair métallique, tout cela metombedessus. J'intercepte et dévie des flèches à main nue, deux m'atteignent, mais à chaque fois, le fleuve de pouvoir jaillit pour les intercepter comme un chien dressé, et elles ricochent ou se brisent sur ma peau. (...)
Je le sens qui imprègne chacun de mes muscles, chacun de mes os, et la fatigue disparaît. Le soleil esttombépuis a émergé à nouveau depuis mon combat avec le Héraut, il l'a fait à nouveau lorsque j'ai atteint ce petit bois de bouleaux et de buissons chiches. (...)
Je pourrais laisser le flot d'énergie continuer d'alimenter mes gestes, je le sens, mais j'ai peur des conséquences. La nuittombedoucement sur ce petit bois perdu au fond de la steppe. On dit que lorsqu'un homme arrive au bout du monde, là où les rêves et les cauchemars deviennent les réalités hantées par le Beau Peuple, il ressent de plus en plus le besoin de continuer, et il devient. (...)
changé, distordu, corps et âme jusqu'à devenir un monstre, ou une parodie de lui-même. J'ai peur de n'avoir plus d'âme, que le bout du monde ne se trouve maintenant en moi-même. La nuittombe. Une nuit noire, sans lune, presque sans bruit, hormis le vent et quelques bêtes. Je me surprends à ne déjà plus les craindre. (...)
J'atterris au bord de la glace, m'y raccroche un instant, et je fais exploser le fleuve d'énergie qui se fond à nouveau dans mon corps lorsque je glisse et que mes doigts nus creusent la glace comme des serres pour m'agripper. Je me hisse désespérément. Peine perdue. La glace cède sous moi. Jetombecomme une pierre dans les ténèbres. Les ténèbres ne durent pas. Je chute tête la première. Plus profond jetombe, plus la faille s'élargit, formant un véritable canyon souterrain. Je tends un bras pour tenter d'attraper une des parois, mais elles sont trop lointaines. (...)
Je recule, trébuche sur mon séant et m'éloigne sans pouvoir quitté ce regard, cet homme des yeux. Chien Enragé. En reculant, mon dos heurte un autre bloc, la neige qui le recouvre s'effrite ettombe, je reconnais l'homme dans celui-là aussi : l'un garde du Maître des Hauts Vents. Ils sont figés dans la glace, terrifiés, terrorisés, pour toujours. (...)
Un, deux, trois pas et je suis sur lui. Une seconde de plus et je le gifle. Son nez saigne, une de ses dents vole ettombeavec un bruit d'argenterie. - Son coeur, rend-le-lui, Libère-là ! - Comment sait-tu que... ? Nouvelle gifle. (...)
Au mieux m'ignoreront-t-ils, au pire ils tenteront de prendre ma tête pour la livrer au maître des haut vents, histoire de se faire bien voir. Je ne leur en veux pas pour ça. Nous aurions fait pareil. J'attends que la nuittombe. Le soleil frappe sur son élu comme un sourd et je suis en sueur, harcelé sans cesse par les mouches, à tel point que je doute un instant de ces faveurs. (...)
Je parviens à rester conscient, je ne sais pas combien de temps ça dure, je sais juste qu'à un moment, le vent se calme, et que la chute commence. Je me concentre et relâche le pouvoir au moment de l'impact, et il arrive tard, très tard. Jetombede si haut que ma chute creuse un petit cratère dans le sol, le rugissement de l'impact m'assourdit, et la main du dieu fou s'abat sur moi, je suis aveuglé un instant mais je ne panique pas. (...)
Au loin, je crois apercevoir la mer tandis qu'audessous de moi, l'impact a balancé des milliers de tonnes de poussière dans les airs. Jetombe, et lorsque j'atterris, creusant un nouveau cratère, je suis sourd comme un pot, ma chemise et ma cape ne sont plus que des souvenirs. (...)
Quelques lampes à huiles éteintes sont censées éclairer les lieux qui autrement seraient plongés dans l'obscurité sans la lumière de mon anima. J'arrive au sommet de l'escalier qui donne sur un croisement de couloir, ettombesur deux serviteurs, deux hommes d'une quarantaine d'années, l'un brun, l'autre roux. Lorsqu'ils m'aperçoivent, ils poussent des hurlements dans un dialecte que j'ignore. (...)
Les rares domestiques que je croise encore, c'est-à-dire trois, me fuient en hurlant avant même de me voir, prévenus de loin par la lumière d'aurore qui m'annonce, sauf un pauvre petit vieux, qui metombedessus par hasard, si effrayé qu'il meurt de peur, la main crispée sur sa poitrine. Dans les murs, j'entends le chaos que cause mon arrivée au sein du Trône d'Orage : des gens courent, hurlent de peur ou des ordres, et tout ce bruit transpire et résonne de façon sourde et étouffée dans les couloirs, comme le prélude à un cataclysme. (...)
Des ordres sont aboyés par dessus le vacarme des armes et des armures que l'on prépare, des portes claquent avec rage et précipitation, d'autres pas résonnent, couvrant le bruit du déluge quitombesur le trône, et tout cela converge vers moi. Aucun des gardes mortels ne peut m'arrêter, ils ont déjà essayé. (...)
C'est pour ça qu'il a détruit le village, il avait vu sa mort... Le destin... d'abord, je pense au tour de cochon qu'il nous a tous joué, mais Brumetombeà genoux, et m'assène la vérité. Je ne comprends pas tout de suite ce qu'elle dit, puis la vérité s'élève dans la salle comme dans mon esprit, comme une nuit noire issue de sa bouche, recouvrant mes pensées, me plongeant dans une obscurité intérieure assourdissante. (...)
Je lui envoie un coup de genou dans le foie et le repousse violemment contre le mur garni de gravures. Iltombe, recule, tente de reprendre son souffle. Pendant ce temps, je repère dans l'abri le bouillon qui mijote. (...)
Elle ne veut pas de la liberté, ni de la justice, elle veut juste être protégée. C'est quelque chose que je ne peux pas lui offrir là où je vais. Vers midi, le venttombeet la poussière avec lui. Je franchis les collines grises et du sommet de ces dernières, je perçois une odeur humide portée par les vents venus du fond des mers, là où ils vont et viennent à leur guise, libres du pouvoir du Seigneur des Hauts Vents et portés par leurs seules volontés. (...)