Comment écrire une campagne historique ?
sur TengaJdr au format (192 Ko)
Contient : campagne (56)Comment écrire unecampagnehistorique ? Un article écrit pour le premier volume de l'Atelier du JDR paru depuis chez Pinkerton Press et utilisant unecampagnede Tenga comme exemple. Jérôme Larré. « Ce n'est que pour les faibles d'esprit que l'Histoire a toujours raison. (...)
L'adage rôliste veut qu'il suffise de prendre un livre d'Histoire pour trouver l'inspiration et avoir sacampagneprête à servir. Muni d'un système générique, le MJ pourrait même se passer du manuel de jeu. Quiconque cherche à écrire unecampagnehistorique, voire à adapter une oeuvre littéraire ou cinématographique, réalise vite qu'il est difficile de se tromper davantage. pour trouver l'inspiration et avoir sacampagneprête à servir. Muni d'un système générique, le MJ pourrait même se passer du manuel de jeu. Quiconque cherche à écrire unecampagnehistorique, voire à adapter une oeuvre littéraire ou cinématographique, réalise vite qu'il est difficile de se tromper davantage. voir une tellecampagne. Si le caractère historique ne change pas fondamentalement la façon de l'écrire, l'exercice recèle toutefois quelques astuces et difficultés spécifiques. Qu'est-ce qu'unecampagnehistorique ? Définir l'écriture historique permet de savoir quand en utiliser les techniques. (...)
l'introduction de ce livre : « Les Affleurements du réel », d'Olivier Caïra Dawnforge - Ce jeu repose sur l'historique des clichés du médiévalfantastique. Unecampagnepeut permettre à la fois de scinder la communauté elfe en deux, de créer sa légendaire antipathie avec les nains et, surtout, de faire des orcs une race ennemie aux hommes suite aux persécutions subies de la main de ces derniers. (...)
vont rejoindre les défenses de l'Etoile Noire et ne faire qu'une bouchée de Luke Skywalker. Deuxième paradoxe : l'Histoire est déjà écrite, mais unecampagnehistorique ne manquera ni de liberté ni de suspense. Il existe de nombreuses façons de justifier des écarts à ce qui figure dans les livres d'Histoire, pour autant que les joueurs les remarquent2. (...)
Ce point étant abondamment traité dans le reste de ce recueil, je me contenterais de trois mots avant de vous y renvoyer : Labyrinthe de Pan. 3. cf. dans ce livre l'entretien avec Julien Heylbroeck sur WarsaW Dernier paradoxe : toutecampagnehistorique ne s'inscrit pas dans un passé éloigné. Ce sont les rapports entre aujourd'hui et l'époqueen question - ne serait-ce qu'implicitement, par la comparaison des moeurs -, et l'existence de jalons déjà écrits qui tissent une trame intéressante à jouer. (...)
Même si l'actualité doit être maniée avec précaution4, faire jouer des événements se passant le 11 septembre 2001, durant un conflit avec des pirates au large de la Somalie, pendant la faillite de Lehmann Brothers ou lacampagneélectorale d'Obama peut être passionnant. Les joueurs n'auront aucun mal à s'immerger dans la période et à se souvenir de certains événements. (...)
Le risque de heurter leur « suspension of disbelief » est certes accru, mais au moins autant que leur satisfaction si tout se passe bien. L'autre cas, plus anecdotique, est celui de l'anticipation. Fonder unecampagnesur des jalons futurs déjà connus et s'intéresser à la façon dont on arrive jusqu'à eux nécessite un travail similaire. On peut le voir comme unecampagnehistorique dont la période de référence nous serait ultérieure. Les soucis de crédibilité et les événements ou personnages connus ne se portent juste pas aux mêmes endroits. C'est au final l'essence d'unecampagnehistorique. Non pas une série de scénarios pour un jeu historique, mais l'écriture d'une histoire spécifique se plaçant au moins partiellement dans les interstices d'une autre histoire - généralement l'Histoire elle-même - et dont certains éléments sont soit connus des joueurs, soit des jalons clairement identifiés. (...)
On peut et doit se méfier de tentatives comme Afghanistan D20 ou Somalia D20. Concrètement, par où on commence ? Concevoir unecampagnehistorique revient donc à : * concevoir unecampagnetraditionnelle ; * l'insérer dans les « pages encore vierges » d'une autre histoire ; * tirer parti des spécificités de l'époque où elle se passe. Voici quelques astuces et techniques pour gagner du temps. (...)
Résolument historique, il plonge des personnages ordinaires dans le tourbillon social, spirituel, militaire et politique qui secoue le Japon à la fin du XVIe siècle et débouche sur son unification. Il s'est d'abord agi d'un jeu maison composé de quelques feuillets.Il était joué au travers d'unecampagne, « Le Triste Destin des Gamajima ». Celle-ci servira d'exemple et de fil rouge pour la suite de cet article. (...)
html Les attentes ludiques et scénaristiques Certaines de ces envies s'imposent, voire sont la raison de se lancer dans la création d'unecampagne. D'autres doivent être plus mûrement réfléchies. Il n'y a pas de bonne et mauvaise façon de faire, ni d'ordre, mais mieux vaut avoir une bonne visibilité des points suivants : * combien de joueurs comptez-vous avoir pour une session donnée ? Et sur lacampagne? ; * lacampagnepeut-elle dépendre de la présence d'un ou plusieurs joueurs donnés ? ; * quel degré de collaboration/rivalité souhaitez-vous entre les PJ ? ; * le groupe doit-il être homogène ou hétérogène ? (...)
Et leur fréquence ? * quel est le niveau global de mortalité (de personnages par joueur) souhaité ? ; * est-ce unecampagneplutôt nomade - les PJ vont au-devant des ennuis - ou sédentaire ? - les ennuis se précipitent sur eux ; * qu'est ce que cettecampagnepermettra à vos joueurs de faire qu'ils n'ont jamais fait ? Comment ? Bien des campagnes sont lancées sans se poser ces questions, alors que la plupart des meneurs savent y répondre. Ces interrogations permettent de maîtriser le « format » de sacampagneet d'en améliorer l'efficacité. L'objectif est de mieux cerner ses envies et son sujet, quitte à se laisser des portes ouvertes, comme par exemple la durée d'unecampagneorganisée en « saisons » Viennent ensuite des questions que nous posons rarement telles quelles. Elles font partie du B. (...)
BA de la dramaturgie moderne, notamment de l'écriture à destination de l'audiovisuel. Quelle est l'idée directrice ? Autrement dit, le « thème » ou le « message » de lacampagne: une phrase décrivant comment et pourquoi les personnages subissent des changements de condition du début à la fin de lacampagne. En évitant la dispersion, on renforce la cohérence entre les éléments de lacampagne, notamment ceux qui, pas forcément palpables, contribuent à sa « couleur » ou à son ambiance. Dans Story (Editions Dixit, 2007), Robert McKee décrit l'idée directrice comme l'association d'une valeur positive ou négative importante pour la fin du récit - Inspecteur Harry : la justice triomphe - avec une raison à cet état de fait - parce que le protagoniste est plus violent que les voyous. (...)
Consciemment ou pas, tout récit, du journal de 20 heures à vos collègues de bureau racontant leur week-end, comporte une idée directrice. Autant maîtriser cet aspect. Son autre utilité est de donner le ton de lacampagneet une idée des conflits auxquels seront confrontés les PJ. Pour « la justice triomphe », on peut imaginer des ambiances très différentes : * parce que le protagoniste est plus violent que les voyous : dure, dans la rue, avec une pression forte et des effusions de violence ; * . (...)
Avec la première idée directrice, une scène où les personnages progresseraient en découvrant un mouchoir dans le compartiment d'un train détonnerait, tout comme une scène de torture ou de passage à tabac d'un suspect surprendrait dans unecampagnefondée sur la deuxième. Ces scènes restent possibles, mais il vaut mieux jouer sur leur côté inattendu et rare, savoir en tirer parti, parce que les joueurs les accepteront de façon différente selon le type decampagne. L'idée directrice du « Triste Destin des Gamajima » est double. Elle tourne autour de la notion qu'en ces temps troublés, seuls ceux qui refusent de s'encombrer de valeurs réussissent et que les vrais héros sont condamnés à disparaître. (...)
Toutes originales et iconoclastes que soient vos idées, demandezvous de quel(s) genre(s) se rapproche votrecampagne. Que vous vous en appropriiez les codes, ou que vous les détourniez, positionnez la selon ce qu'elle est ou n'est pas en termes de « genre »7. (...)
net : 2003) identifie trois types de conventions, qui permettent de clarifier vos attentes pour votrecampagne: Les conventions d'univers - Tout ce que les personnages d'un tel univers peuvent raisonnablement savoir : le voyage hyperluminique existe en science-fiction, ou les singes qui parlent, les ptérodactyles et les zeppelins nazis en pulp. (...)
Les attentes « historiques » Comme les attentes ludiques, les éléments historiques sont souvent définis intuitivement quand commence l'écriture, mais les expliciter permet de mieux calibrer unecampagne: * quand et où se passe l'action ? ; * quel niveau de crédibilité et de précision historique ? (...)
Hormis l'uchronie, le procédé le plus répandu et le plus agréable, du fait de sa part d'ironie romantique, est d'expliquerpourquoi l'Histoire officielle est faussée. Ainsi, dans une des fins possibles de lacampagne« Tiàn Xia » pour Qin, Ying Zheng décide de remanier l'histoire de son empire naissant pour en écarter toute mention du nom des protagonistes et de brûler tous les livres les mentionnant ; * souhaitez-vous instruire vos joueurs ? (...)
Axes historiques et sens de l'Histoire Si elle se base sur une époque raisonnablement documentée,aucunecampagnene pourra aborder toutes ses subtilités et grilles de lecture possibles. Les axes historiques correspondent à ces perspectives et aux « sujets » historiques que l'on souhaite utiliser. (...)
Ainsi, Tenga évoque ou développe la structure sociale de l'époque, la ségrégation de certaines communautés sociales et ethniques, l'opposition entre modernité et tradition, l'urbanisation naissante, la mise en place de quartiers des plaisirs, les guerres féodales et l'unification du Japon, les guerres religieuses, l'implantation des Européens, l'évolution des techniques, l'attaque de la Corée, la chute du pouvoir shogunal et impérial, etc. Unecampagnedoit limiter le nombre d'axes pour rester cohérente et pouvoir tous les traiter à leur juste valeur. (...)
Ainsi, si la Révolution française va globalement dans le même sens que l'idéal des Lumières et qu'aucun personnage de la fin du XVIIIe ne peut ne pas avoir d'avis dessus, certaines de ses conséquences, comme la Terreur, ne vont pas dans ce sens et offrent donc un grand nombre de scènes intéressantes. Les composantes de lacampagneA présent, vous disposez d'une liste claire de vos envies, tant d'un point de vue ludique et scénaristique qu'historique. Définir les composantes de lacampagneva leur donner corps. Votre histoire impliquera certains thèmes, notamment au travers de l'idée directrice ou du genre. (...)
Cela peut également être le cas du jeu et/ou du système dont vous vous servez. Pour l'équilibre et le rythme de votrecampagne, il importe de voir comment ces aspects s'articulent avec les axes historiques retenus. Si les thèmes (narratifs) et les axes (historiques) s'opposent, vous êtes dans la meilleure des situations et aurez a priori un grand nombre de conflits et de péripéties possibles juste en jouant sur cet antagonisme. (...)
Il s'agit du principal challenge qu'auront à affronter les protagonistes,généralement à la fin de la trame générale. Elle donnera sens à l'ensemble de lacampagneet la résumera, sous la forme d'une question à laquelle on ne répondra qu'en la finissant. Pour une problématique ancrée dans l'Histoire, l'idéal est de s'inspirer de l'articulation thème narratif et enjeux historiques. (...)
Sont-ils loyaux au point de ne plus exister ou considèrent-ils que leur loyauté doit s'effacer lorsque ni leur maître ni eux-mêmes n'existent plus ? Vient ensuite le choix, par essence biaisé, du type decampagne. Sera-t-elle axée sur une intrigue (« procédurale ») ou sur un décor et ses personnages (« ouverte »). (...)
Il s'agit du lieu, de l'époque, mais aussi de l'échelle à laquelle va se passer l'intrigue et plus globalement à la fois de la quantité, du niveau de détail et de la nature des forces auxquelles seront confrontés les PJ. Le travail préalable sur vos attentes et sur les axes historiques porte alors ses fruits. Si votrecampagneprend place durant la Prohibition et qu'un de vos axes est la montée du syndicalisme, vous ne détaillerez qu'une ville avec ses quartiers, ses grandes entreprises, ses réseaux criminels ou judiciaires, ses factions, etc. (...)
Les cadres peuvent être variés : une caravane (Hurlements), un vaisseau (« Darstryder » pour Star Wars) ou un train (« Terreur sur l'Orient-Express » pour L'Appel de Cthulhu), une ville (« La Cité des mensonges » pour L5A,« Ptolus » pour AD&D), une nation (« The Great Pendragon Campaign » pour Pendragon ou « LaCampagneimpériale » pour Warhammer), un continent (« Barsaive at War » pour Earthdawn, « Tiàn Xia » pour Qin,« Dragonlance » pour AD&D), plusieurs lieux spécifiques dans le monde entier (« Les Masques de Nyarlathotep » pour L'Appel de Cthulhu), voire au-delà (la plupart des campagnes Star Wars). (...)
La façon dont sont créés et agissent les personnages est sans doute le procédé le plus percutant de donner corps à votrecampagne. Qu'il s'agisse des protagonistes, des antagonistes principaux ou même de seconds rôles hauts en couleur, cette étape est incontournable. (...)
Le travail sur les personnages se divise en quatre : * identifier en quoi les vôtres doivent être différents de ceux d'une autrecampagne(et notamment en quoi ils sont le reflet de leur époque) ; * conditionner ou personnaliser les règles de création des PJ afin que cela corresponde à votrecampagne(à son genre par exemple) ; * créer et caractériser les antagonistes principaux. James Bond 007 proposait dès 1983 une classification adaptée à son univers, mais il en existe de nombreuses autres ; * leur préparer des conflits et des scènes leur permettant de se développer ou d'illustrer certaines spécificités de leur époque, à la hauteur de leur utilité dans lacampagne. Les PJ du « Triste Destin des Gamajima » sont des jeunes samouraïs sur le point de passer leur cérémonie de transition vers l'âge adulte. (...)
Quelques PNJ détonnent et se rapprochent d'eux : deux figures paternalistes, l'intendant de leur clan et le diplomate de leur suzerain, et le jeune seigneur de la province, Ukita Hidie, qui s'identifie à l'un d'entre eux. Dernière composante : l'intrigue. Souvent confondue à tort avec lacampagnedans son intégralité, elle en reste généralement un élément majeur. Il s'agit de l'ensemble des situations, événements ou scènes auxquels seront confrontés les PJ, et des liens qui les unissent. (...)
En quelque sorte, l'intrigue est l'ensemble des péripéties que vont connaître les personnages dans le décor et qui leur permettra de répondre à la problématique de lacampagne. Elle comprendra plus ou moins d'ellipses selon le type de cette dernière. Il n'y a pas de recette infaillible pour construire une bonne intrigue. (...)
Pour les campagnes complexes, une méthode qui a fait ses preuves est de : * commencer par le final/paroxysme : c'est l'élément à l'aune duquel lacampagnesera évaluée. Il doit donc tirer toute l'intrigue. C'est aussi le moment où la dimension historique prend son sens : les PJ font l'Histoire, en sont les victimes ou parviennent à l'éviter ; * lister les arcs à intégrer - ce sont les sous-intrigues ou les évolutions de chaque personnage ; * s'assurer d'avoir au moins un arc par protagoniste principal ; * lister les scènes-clés, pour leur fond - rebondissement ou progression de l'intrigue - ou leur forme - côté spectaculaire, conflit original ; * intégrer les scènes correspondant à chaque arc, et délimiter grossièrement des parties - exposition, développement I, développement II et dénouement - et leur contenu. (...)
Reconquête : ils reconquièrent leur province et démasquent l'usurpateur. * . * tracer un déroulé avec autant de lignes que d'arcs, les actes de lacampagne, et placer les parties des différents arcs où elles semblent les plus opportunes. Cela revient également à situer les différents climax et coups de théâtre correspondants ; * s'assurer du respect des contraintes supplémentaires que vous vous serez fixées - par exemple : présenter l'antagoniste principal dans l'exposition, alterner l'idée directrice et son antithèse pour obtenir un rythme élevé, alterner les niveaux d'intrigues, les types de scènes, etc. (...)
Certains s'en passent, mais autant s'accorder ce petit plaisir : trouver un titre à votre travail et ponctuer ainsi la fin de sa conception. Vous n'aurez peut-être pas lacampagneultime à chaque fois. Il faudra la retravailler constamment en fonction des réactions de vos joueurs. (...)
Ce sera certes toujours à vous et à vos joueurs de transformer l'essai, mais vous devriez avoir quelque chose de suffisamment solide pour vous reposer dessus. Il ne reste donc que l'essentiel : faire jouer votrecampagne! Les intrigues de convalescence Sous ses formes les plus réalistes, le jeu de rôle à dominante historique conduit parfois à des situations de blocage narratif : lacampagnes'interrompt car l'un des PJ est malade, meurtri ou mutilé et, faute d'« usine à points de vie » (clerc, potion magique), le système de jeu lui impose plusieurs jours ou semaines de convalescence. De nombreux groupes vivent cela comme un mal nécessaire, recourant tantôt à des PJ de substitution, tantôt à des ellipses (« Trois semaines plus tard, te voilà remis sur pieds... ») pour ne pas ralentir leur séance. (...)
Le disparu va jouer une ou deux aventures en solo, tandis que le reste du groupe annoncera sa mort à ses proches, aux autorités... jusqu'aux retrouvailles. Pas de temps mort pour les blessés Le meneur d'unecampagnehistorique sait qu'il aura tôt ou tard des convalescences à gérer, mais il ignore quand, où et pour quels personnages. (...)Un article écrit pour le premier volume de l'Atelier du JDR paru depuis chez Pinkerton Press et utilisant une campagne de Tenga comme exemple. Jérôme Larré. « Ce n'est que pour les faibles d'esprit que l'Histoire a toujours raison. » - Eugène Ionesco, Notes et contre-notes. « Lorsqu'on est obligé de travailler à l'intérieur d'un cadre strict, l'imagination est d'autant plus sollicitée et produira ses idées les plus riches. » - T.S. Eliot. Longtemps jugé moins divertissant que sa ...