Des Oombres passionnantes
sur SciFi-Universe
Contient : univers (13)(...) L'ambition du collectif Forgesonges est donc louable : aller jouer dans la cours des grands en proposant, à long-terme, une gamme vaste, à une époque où les productions rôlistiques sont plutôt marquées par des gammes petites et closes (c'est à dire avec un nombre bien déterminé de suppléments). Ainsi, dans ce premier livre -Univers- n'est décrit qu'une petite partie de l'universd'Esteren, à savoir juste une péninsule regroupant trois états. Le reste est ainsi destiné à être traité et à sortir dans de futurs ouvrages, aux côtés de campagnes et de suppléments destinés au seul meneur de jeu. (...)
Ainsi, dans l'esprit de ce concept de gamme conséquente, ce premier ouvrage n'est pas à proprement parler un livre de base complet et autonome. Son nom, 'Univers' indique parfaitement la nature de son contenu, à savoir une description générale de la péninsule de Tri-Kazel (où débute le jeu) accessible aussi bien aux meneurs de jeu qu'aux joueurs ; vous ne trouverez donc pas dedans de grande révélation sur les mystères de ce background, où sur ce qui se passe dans l'ombre et qui peut influer de manière visible sur ce qui se déroule dans ce monde. (...)
Se plaçant dans la peau des habitants qui peuplent la péninsule, le meneur - et, pourquoi pas, les joueurs - vont avoir accès à la somme commune des connaissances que possède toute personne vivant dans ce monde ; le problème de l'information étant réel dans cesuniverssans technologies de la communication, il apparaît ainsi normal et logique que nous ne sachions au final pas grand chose sur le continent avoisinnant (là où, amenée différement, cette absence d'information aurait pû être frustrante). (...)
Les Ombres d'Esteren, à première vue, est ainsi un monde de low fantasy - c'est à dire peuplé uniquement d'humains, et où les créatures surnaturelles sont quasi-inexistantes - dans lequel la magie, si elle existe bel et bien, reste rare et relativement méconnue. De fait, sa représentation par les joueurs est aisée, l'universétant nettement plus médiéval que fantastique. Cela était de toute façon nécessaire pour renforcer l'aspect horreur de l'universet ainsi justifier que les personnages aient peur de ce qui ressort du surnaturel (c'est également pour cela qu'Antheas, dans un genre assez similaire, ne proposait pas non plus ununiversissu de la high fantasy). Les Ombres d'Esteren baigne ainsi dans une menace et une peur qui n'est pas sans rappeler quelques éléments du classique Ravenloft. Il est cependant dommage que les auteurs n'aient pas plus insisté là-dessus dans leur description du monde. (...)
Ainsi, à l'exception des parties ouvertement consacrées à cela - notamment celles sur les féonds - on ne sent pas suffisamment l'horreur et la dimension psychologique dans la description 'quotidienne' de l'univers. Bien entendu, il ne s'agit là que d'un défaut purement formel qui ne ressort que de la lecture du livre, cette dimension faisant, en jeu, partie intégrante de l'univers. En fait, là où les auteurs ont réussi un véritable coup de force, c'est en opérant un glissement de point de vue par rapport aux personnages. A quelques exceptions près (notamment dans les divers jeux tirés d'Elric), les personnages desuniversmédiévaux-fantastiques sont généralement des surhommes, tant physiquement que psychologiquement, que la vue du sang ou de n'importe quel évènement surnaturel ne fait pas le moins du monde flancher. (...)
Le jeu tourne bien, et la présence des voies lui donne une petite saveur qui empêche l'amalgame avec un quelconque système générique. La magie, à ce niveau, s'avère réellement bien traitée : occupant une part plutôt discrète de l'univers, il aurait été dommage qu'elle ait besoin d'une usine à gaz pour correctement fonctionner autour d'une table ; ce n'est heureusement pas le cas, les trois types de magie s'utilisent simplement, avec des systèmes de jeu instinctifs qui font la part belle à leurs spécificités (pourtant, entre les Dermorthèn, qui s'apparentent à des druides, et la magience, qui fait plus penser à du steampunk, il y a un fossé). (...)
9 Passé le choc de la claque liée à l'esthétique magnifique dont bénéficie ce premier livre, il est agréable de constater que Les Ombres d'Esteren est aussi réussi sur le fond que dans sa forme. En mixant les ingrédients traditionnels d'universmédiévaux-fantastiques avec des éléments d'horreur d'ordinaire réservés aux jeux contemporains, les auteurs sont parvenus à mettre en place un monde facilement abordable, mais où le déplacement de point de vue par rapport aux personnages - plus proches de l'investigateur Cthulien que du guerrier D&Desque - donne une saveur bien particulière au jeu. Toutefois, si ce volet 'Univers' est réellement qualitatif, l'intérêt du jeu à long terme reste intimement lié au contenu du futur 'Livre des Secrets', qui en constituera la colonne vertébrale. (...)Les Ombres d'Esteren a été, pendant quelques années, une belle arlésienne. Projet initié par le collectif d'auteurs Forgesonges (à qui l'on doit, notamment, le recueil des Démiurges en herbe), ce jeu de rôle aura fait crever d'impatience nombre de rolistes sous le coup de ses retards répétés. Il aura ainsi fallu attendre 2010 pour que le livre de base sorte enfin, et que l'on puisse enfin acquérir ce qui était petit à petit devenu une chimère dans l'esprit de beaucoup. Mais une fois l'objet en main ...