Comment rendre une scène de combat épique
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Ce billet vient d'une discussion sur Casus-no avec Erwan G. (et de dizaines et dizaines avec Rom1 sur les films de sabres) où ce dernier se demandait comment faire pour amener de la variété dans les combats en jdr, et comment les rendre « épiques ». Vu qu'il est toujours aussi difficile d'avoir ce genre de discussion sur forum, je m'étais fendu d'une réponse en privé, en attendant de la mettre en ligne ici. Par contre, elle répond davantage sur la variété des scènes de combat (comment les rendre ...Contient : scène (27)Comment rendre unescènede combat épique Ce billet vient d'une discussion sur Casus-no avec Erwan G. (et de dizaines et dizaines avec Rom1 sur les films de sabres) où ce dernier se demandait comment faire pour amener de la variété dans les combats en jdr, et comment les rendre « épiques ». (...)
Par contre, elle répond davantage sur la variété des scènes de combat (comment les rendre « uniques » ?) que sur leur côté épique. Il me semble que la première qualité d'unescènede combat épique, outre d'avoir un enjeu réel, est justement d'être unique. Ce texte étant vraiment très long, il sera divisé en deux : 1. Unescènede combat est unescènecomme les autres. 2. Unescènede combat est un conflit comme les autres (que je mettrai en ligne sans doute demain). 1. unescènede combat est unescènecomme les autres : 1.1. un début, un milieu, une fin : Pour commencer, unescènede combat, comme toutes les autres, a un début, un milieu et une fin. Autrement dit, elle ne débute pas forcément par une charge, mais il peut y avoir une montée en tension qui se fait différemment, progressivement, ou au contraire, de façon extrêmement brutale. Inversement, la fin n'est pas forcément la mort d'un des camps, mais elle peut être déclenchée par un taux de perte, ou un élément narratif autre (comme la prise d'un point stratégique, d'un objet, la réalisation d'une action, etc...) et se matérialiser par une fuite, une capture, ou toute autre chose (la chute des boucliers qui protègent un vaisseau en orbite, l'ouverture des portes de la ville, etc...). Même si c'est sans doute mieux de ne pas connaître à l'avant l'issue de lascène, il est toujours bon de savoir comment elle commence, ce qui en déclenche la fin, et comment on peut progresser dans la suite de l'histoire que les personnages gagnent ou perdent. Ainsi, d'une certaine façon, unescènede combat est une « mini-histoire » à elle toute seule et, même si c'est de façon très brève, elle nécessite elle aussi une mise en place, un dénouement et un paroxysme, à son échelle. (...)
Il s'agit d'un ressenti global, pas forcément d'une situation objective, tactique, ou autre...Généralement pour créer une dynamique (notamment sur des scènes beaucoup moins actives que des scènes de combat), et soit une excitation, soit de la tension, il est souhaitable que la charge évolue au sein de lascène, voire s'inverse. Appliqué à unescènede combat, typiquement, on a une opposition qui est souvent plus intéressante si elle commence mal et fini par une victoire que les joueurs/personnages auront l'impression d'avoir arrachées ou au contraire, si malgré une position initiale favorable, elle se finit mal pour les personnages. Cela permet souvent d'impliquer davantage les joueurs ou de révéler la puissance réelle d'un antagoniste qui n'avait pas forcément eu l'occasion de l'exprimer par ailleurs. (...)
Cela peut se faire également de façon un peu moins directe et frontale (ou avec plus de variations au sein d'une mêmescène) en jouant sur la différence entre le combat et son enjeu/sa raison d'être. Ainsi, on peut créer cette dynamique en créant par exemple unescènede sacrifice (on a du perdre, mais pour gagner), une victoire à la Pyrrhus (on a gagné, mais à un prix tel qu'on n'est plus du tout sûrs que cela valait le coup), un rebondissement ironique (contre toute attente, on a gagné, mais on s'aperçoit que les vaincus étaient en fait nos alliés que l'on n'avait pas reconnus), ou une opposition de type on a gagné/perdu une bataille mais cela nous a fait perdre/gagner la guerre... Cela dit, si cette technique est sans doute très utile pour un récit classique, elle reste à utiliser avec des pincettes dans du jdr si vous ne voulez pas que vos joueurs vous jette des pierres en pensant que vous ne leur laissez aucune liberté. Donc si vous vous en servez, essayez de vous composer une version par défaut, mais laissez vous quand même un peu de latitude et surtout la possibilité d'être surpris. (...)
Il existe enfin un certain type de scènes pour lesquelles il vaut mieux ne pas inverser la charge : celles qui sont là pour montrer un enchaînement de mal en pis (généralement avant de toucher le fond et que les pjs redressent la barre...typique dans une campagne militaire type WWII) ou au contraire une success-story (généralement qui sert à renforcer un effet de chute au moment où les personnages perdent tout). 1.3. des objectifs : De plus, on distingue en général trois utilités à unescène: - faire avancer l'intrigue. - développer les personnages. - être viscérale (en foutre plein les yeux, faire peur, etc...). (...)
De la même façon par exemple qu'un introduction de partie in media res avec un combat permet généralement de capter tout de suite l'attention de tous les joueurs. Donc, même si elle est impromptue, unescènede combat doit avoir un ou plusieurs de ces quatre objectifs. Si elle n'en a aucun, cela veut généralement dire non seulement qu'on peut l'enlever - vu qu'elle n'apporte rien -, mais qu'on doit le faire - vu qu'elle prend du temps et de l'énergie qui auraient été mieux employés ailleurs. (...)
L'idéal est également de ne pas trop cumuler de ces objectifs et de ne pas nuire à la lisibilité de lascènepour les joueurs. Cela semble un peu idiot, mais c'est très facile d'avoir la main lourde, à trop vouloir rendre sascèneinoubliable. Surtout s'il s'agit du paroxysme de votre séance de jeu où si celle-ci clôture un arc long de plusieurs sessions. (...)
Ainsi pour prendre encore une fois un exemple venant du cinéma, la confrontation finale entre Anakin et Obiwan dans la revanche des siths : on voit d'abord que lascènene commence pas par un combat, mais par environ deux minutes de discussion et Anakin qui s'en prend à Amidala et fait comprendre à Obiwan à quel point il est perdu pour la cause (développement des personnages) ; puis arrive ensuite le début du combat en « intérieur » (2 min) où il ne se passe pas grand chose de plus que montrer les deux antagonistes sont de force égale et commencer à en mettre plein les yeux, avant une autre en extérieur dans des torrents de lave (3 min) où il n'y a vraiment que du viscéral à part peut être une légère différenciation entre un Obiwan plus malin et un Anakin plus puissant ; enfin, environ deux minutes presque sans coups échangés à part le décisif, et les conséquences du combat qui permette de faire avancer l'histoire en justifiant les choix de ces deux personnages dans les épisodes IV et suivant. Bref, dans cettescène(qui pour le coup est effectivement épique et clairement, presque mécaniquement, découpée en 4 actes), le combat ne sert pas juste à faire avancer l'histoire où à mettre les personnages en danger (et d'autant moins qu'on en connaît déjà l'issue), mais bien à servir plusieurs objectifs clairement identifier : c'est à la fois le moment que tout le monde attend et il faut que cela soit viscéral, mais cela doit aussi être l'instant de vérité à la fois au niveau des arcs des personnages qui en seront irrémédiablement changés, mais aussi « planter » toutes les graines des événements de l'épisode IV (notamment vis à vis d'Amidala et de ses enfants par exemple). (...)
Autrement dit, pour de l'épique, il faut que ça pète et que soit visuel (pour de l'horreur ou du thriller, ce serait bien sûr différent) : musique adaptée ; gérer le rythme et les descriptions plus que les valeurs chiffrées sauf si celles-ci sont exceptionnelles ; décor dynamique et correspondant à la grandiloquence/au ridicule de lascène: duel dans un château en train de s'effondrer, un volcan d'exploser, au sommet d'une montagne, au milieu d'une gigantesque plaine, à dos de dragon qui foncent à des dizaines de kilomètres heures, etc... adversaires démesurés ou compléments anormaux (pensez à shadow of the colossus par exemple, ou à réinjecter de l'émerveillement dans les clichés de la fantasy...combien de meneurs font ressortir les dimensions réelles d'un dragon ou la bizarrerie de se battre contre un élémentaire de feu ? (...)
) prévoir des descriptions qui évoluent ou des événements à l'avance (comme les sous-scènes) afin de pouvoir garder le rythme et l'impact visuel tout en improvisant/gérant le combat, c'est très vite très difficile à tenir sur la durée. 1.4. des amorces et des récompenses : Enfin, unescènede combat, comme toutes les autres scènes, s'inscrit dans la continuité de l'histoire et peut donc être l'occasion de placer des amorces (set-up) ou constituer en soi une chute/récompense (pay-off). (...)
Tous sont des pièces d'un puzzle que l'on voit partiellement venir (mais jamais complètement) et qui renforcent l'effet d'unescèneultérieure. Ici les cinq dernières minutes où Hercule Poirot raconte aux criminels médusés par son intelligence comment s'est passé le crime qu'ils ont commis, avant d'expliquer comment il les a démasqués. Par exemple, dans un univers de fantasy, lors d'une classiquescèned'auberge, on apprend qu'un terrible brigand sème la terreur dans la région et est connu pour être d'une force herculéenne, avoir le visage déformé par une balafre et ne jamais faire de prisonniers. (...)
Si, enfin, dans le combat contre le spadassin, ce dernier leur donne un indice sur la nature de sa compagne, ou sur la façon de la battre, cettescènede combat comportera une amorce d'une futurescène(qui peut être ou pas elle-même unescènede combat)...