Constantinople
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Contient : culture (25)(...) Le second est l'existence, à partir de 330, d'une « nouvelle Rome » dans la partie orientale de l'Empire: romaine en effet par ses institutions, elle est grecque par son peuplement, sa langue et saculture; et c'est par elle que le monde grec recevra enfin l'organisation politique puissante qu'il n'a encore jamais connue. (...)
Si les Byzantins se sentent politiquement des Romains (leurs historiens parlent toujours de l'empereur, de l'armée ou du peuple des Romains, jamais des Grecs), par laculture, ils se sentent entièrement grecs, héritiers directs de la civilisation classique et hellénistique. (...)
D'autre part, Byzance, longtemps isolée et comme assiégée entre les Barbares de l'Occident et du Danube et les civilisations peu assimilables de l'Orient, tendait à s'enfermer dans sa vieilleculturenationale, à laquelle elle apparaît encore plus attachée sous les Comnènes ou même sous les Paléologues que sous Justinien. (...)
C'est en bon administrateur d'un patrimoine que le Byzantin s'est fait l'homme des compilations, des commentaires et des encyclopédies; l'humanisme byzantin, à la différence de l'occidental, ne pouvait suivre que d'assez loin l'érudition, car le lettré byzantin était moins relié par sacultureà l'homme universel que confiné par elle dans son orgueil de Grec. Il ne faudrait cependant pas croire que ce goût pour le passé fût purement gratuit. (...)
En imposant au génie grec son goût de l'ascétisme, son moralisme sévère, son dédain des contingences terrestres et même, à certaines époques, sa méfiance à l'égard de laculturepaïenne, elle a contribué à en diminuer la spontanéité et la puissance créatrice. Mais, d'autre part, par la nécessité d'être comprise de tous, l'Eglise a atténué les effets fâcheux de l'érudition et de la rhétorique sur l'expression littéraire. (...)
Parmi les hommes d'Etat qui entourent ces empereurs, il y a aussi beaucoup d'Occidentaux; du reste, la langue de l'administration et des tribunaux est encore le latin, et non le grec. Même dans le domaine de laculture, le grec n'a pas encore conquis toutes les positions: ainsi, l'université de Constantinople réorganisée par Théodose II compte seulement seize chaires grecques pour quinze latines. (...)
Mais le parti monophysite était désormais trop puissant pour qu'on pût l'éliminer, et le grave problème qu'il posait pour l'unité de l'Empire devait empoisonner tout le règne de Justinien. Si le bilan de celui-ci fut positif en d'importants domaines (législation,culture, commerce extérieur), il s'avéra vite que Justinien avait surestimé les ressources militaires et économiques de l'Empire, qui ne pouvait à la fois garantir ses frontières du Danube et de l'Orient et défendre la pars occidentalis contre un retour offensif des Barbares; en revanche il avait largement sous-estimé le danger slave. (...)
Cette période qui vit réduire de moitié l'étendue des territoires où s'était exercée l'autorité de Justinien, couper les grandes voies commerciales vers l'Orient et l'Occident, reculer lacultureet l'activité urbaine, amener par deux fois l'ennemi jusque sous les murs de la capitale, présente tous les aspects d'une décadence. (...)
La mort inopinée de Kroum avait ramené la tranquillité sur le front bulgare (814), mais la terrible rébellion de Thomas le Slave mis l'Asie Mineure, puis la Thrace, à feu et à sang, de 820 à 823; et les Arabes, progressant toujours en Méditerranée, emportaient la Crète, débarquaient en Sicile. Sous Théophile souverain artiste, fastueux et cruel qu'attirait d'ailleurs laculturearabe, les califes abbassides reprirent même la guerre en Asie Mineure, occupèrent Ancyre et Amorion. (...)
Le rétablissement solennel du culte des images marque le début d'une véritable renaissance pour l'Etat byzantin comme pour laculturehéllénique. Deux grands hommes d'Etat, le logothète Théoctistos et le frère de Théodora, le césar Bardas, qui se succédèrent sous le règne de Michel III, restaurèrent l'enseignement, reconstituèrent les réserves d'or, prirent l'offensive contre les Arabes et aussi contre les hérétiques pauliciens qui, persécutés par Théodora, avaient constitué sur le haut Euphrate un Etat indépendant, allié aux Arabes. (...)
L'affaire Photius : Plus marquante encore est la figure du patriarche Photius, ancien professeur d'un immense savoir, qui donna à laculturebyzantine une impulsion décisive. Photius devait son siège à Bardas qui, pour l'y installer, s'était débarrassé assez lestement du patriarche Ignace, représentant du parti des zélotes, c'est-à-dire des intransigeants (des moines surtout, particulièrement éprouvés par les persécutions iconoclastes), déçus de voir que la réconciliation de 843 s'était accomplie sans vengeance ni représailles à l'égard des vaincus. (...)
L'art vénitien et l'art slave sont encore là aujourd'hui pour attester combien cette politique a servi le prestige et, par conséquent l'influence de Byzance en Orient comme en Occident. D'autre part, le haut niveau de lacultureétait indispensable au recrutement du personnel administratif dont l'Empire avait besoin. C'est en effet sous les Macédoniens que les progrès du système administratif sont le plus notables. (...)
Son règne fut celui des lettrés, dont le plus marquant est Michel Psellos, et ouvre la période la plus brillante de laculturebyzantine. En revanche, l'administration commença à se détériorer: on vit apparaître le système de la ferme des impôts, et l'on commença à remplacer par un versement en espèces le service militaire dû par les stratiotes. (...)
Les trois premiers Comnènes pourront bien, par leur courage, leur ténacité, leurs brillantes qualités de diplomates, reconquérir une grande partie du territoire envahi et conjurer pour un siècle le péril turc en Asie et en Europe, ils n'en resteront pas moins prisonniers de la classe qui les aura mis au pouvoir, et de ses intérêts: caste au loyalisme toujours douteux, dont assurément la tenue est meilleure que celle de la noblesse civile du XIe siècle et laculturesouvent raffinée, mais orgueilleuse et fermée; avide de titres et de privilèges, elle n'éprouve ni pitié ni sollicitude pour un peuple qui souffre. (...)
De cette place très forte qui barrait la route de l'Asie Mineure aux attaques venues de Constantinople et qui était en même temps un centre religieux vénéré des Grecs, Théodore fit une capitale administrative et un centre deculture, d'ailleurs bien modeste encore. Il eut bien du mal à imposer son autorité à l'aristocratie locale et à défendre son Etat naissant contre les « Grands Comnènes », ces descendants d'Andronic installés à Trébizonde, et contre les Latins. (...)
Manuel II était mort en 1425, regretté de tout le peuple; homme bon et de grand caractère, respecté des Turcs eux-mêmes, au surplus grand ami de lacultureet écrivain de talent, il avait su attirer les étudiants occidentaux dans l'Université réorganisée par ses soins. (...)
Constantinople n'est pas encore le centre unique d'un empire où le grec n'est pas encore la seule langue deculture, où la foi de Chalcédoine n'a pas encore rallié toutes les âmes. La plupart des éléments politiques, sociaux, culturels qui formeront l'Empire proprement byzantin apparaissent durant cette période, mais encore mêlés aux structures caduques héritées du passé. (...)
Dans l'Empire appauvri, diminué, ravagé par des guerres continuelles, amputé des deux grandes métropoles d'Antioche et d'Alexandrie, déchiré par deux crises religieuses qui opposent l'orthodoxie à l'autorité impériale, lacultureest en décadence; seule la science médicale est encore illustrée au VIIe siècle par Paul d'Egine, dont l'Abrégé de médecine servait encore à l'Université de Paris au XVIIIe siècle. (...)
Mais celles qui nous sont parvenues, constamment transformées au cours des âges, sont aujourd'hui très difficiles à dater. L'âge d'or (1025-1204) : Au point de vue de laculture, le « siècle des Comnènes » commence en fait avec le déclin de la dynastie macédonienne, après la mort de Basile II (1025); durant le long règne du plus grand souverain byzantin, sorte de moine-soldat peu ami des lettres, Byzance subit une éclipse intellectuelle. (...)
A côté de l'Université fonctionne l'école patriarcale, qui forme les futurs cadres de la hiérarchie ecclésiastique aux études profanes avant de leur dispenser un enseignement proprement religieux. Un nouvel humanisme : La littérature de ce temps a donc pour base uneculturegénérale plus profonde et mieux équilibrée, plus directement reliée aux sources antiques que celle du siècle précédent: c'est le début d'un nouvel humanisme, que favorisent encore au XIe siècle les rapports multipliés avec l'Occident latin. (...)
Sous les Comnènes, pourtant issus de la noblesse militaire, la Cour deviendra, non plus un foyer d'érudition comme sous Constantin VII, mais celui d'unecultureplus créatrice et plus artiste qu'à l'époque macédonienne. La différence se mesure bien au style des écrivains de l'une et l'autre période: au lieu de chercher à prouver son savoir par une langue très travaillée et chargée de termes rares, on cherche à se conformer au canon d'un atticisme rénové. (...)
Jean Italos et Eustrate furent condamnés pour hérésie. Il n'en existe pas moins, dans l'Eglise d'alors, un courant très favorable à lacultureprofane, surtout chez les hauts prélats: tels le patriarche Jean Xiphilin (1010 env.-1075 env. (...)
La dernière renaissance (1282-1453) : On pourrait s'attendre à ce qu'à la lente décomposition de l'Etat byzantin à partir de la mort de Michel VIII (1282) corresponde une décadence intellectuelle. Il n'en est rien. En réalité, la hauteculturequi est de tradition dans la dynastie des Paléologues, la nouvelle Université réorganisée par Manuel II et qui attirera les étudiants italiens, le prestige du patriarcat et de son école, une décentralisation imposée par le morcellement du domaine byzantin et qui fera de Thessalonique et surtout de Mistra des centres deculture, le grand mouvement spirituel de l'hésychasme enfin, tout cela contribue à maintenir la vitalité des lettres byzantines; et plus encore, peut-être, les contacts plus fréquents avec l'Occident et l'épanouissement d'un esprit de liberté grâce à la disparition de la contrainte exercée par un Etat puissant. Un esprit de liberté : L'impulsion est donnée dès le début de cette période par une génération de grands professeurs et de hauts fonctionnaires - souvent les deux à la fois - tels que Georges Pachymère (1242 env. (...)
Recherches sur l'habitat et la vie matérielle, sur la fonction et la signification des peintures ainsi que sur le fonctionnement des édifices qui les abritent, sur la place de l'image dans lacultureet les mentalités, autant d'approches convergentes qui ont fait émerger Byzance du grandiose théâtre d'ombres où elle était encore cantonnée il y a un siècle. (...)Les Byzantins usaient ordinairement, pour désigner la capitale de leur Empire, de trois termes qui correspondent à son origine, à son rôle dans la vie politique, à sa suprématie économique et culturelle: ils l'appelaient soit la «ville de Constantin » (Kynstantinoupoliv), soit la «nouvelle Rome », soit la «reine des villes» (ou simplement la «reine», c basiliv). De fait, aucune nation peut-être n'a donné plus d'importance à sa capitale, et cette particularité explique bien des traits remarquables ...