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J'ai retiré deux choses de ces minutes que la Réalité transforma en éternité de souffrances : La première est que rien ne différencie un océan Réel d'un océan d'Ombre ; la seconde que l'éternité a pour les Ambriens une fin que notre Réalité n'offre pas. Ou plutôt si, elle l'offre. A plusieurs reprises même, selon les dires de ma mère. Comment ne pas la croire, elle qui par son sang est responsable de ce que j'ai coutume d'appeler de manière fort égocentrique ma malédiction. Je suis de ces ...Contient : vie (10)(...) La seule limite que je concevais une fois l'être Aimé rencontré, c'est celle de la séparation inexorable qu'entraînerait la mort. Sa mort. J'avais résolu au soir de laviede ma compagne, de m'enfoncer avec elle dans les ténèbres des fosses abyssales. Jusqu'à mourir du vertige des profondeurs qu'entraînent l'anoxie et les surpressions. (...)
A la condition qu'elle choisirait le moment, celui qui nous unirait pour toujours...J'acceptai à mon tour, frissonnant morbidement à l'idée de ce délicieux imprévu ! Laviepoursuivait doucement son cours. Et nos graves réflexions étaient depuis bien longtemps dédramatisées, et plus sujet de délires verbaux que sources de soucis ou d'honneur. (...)
Mais elle voulut que j'en sache plus sur moi même, mes souvenirs, et mes sentiments. Je lui répondis que mavieavec ma bien aimée m'apprenait chaque jour de nouvelles choses à mon sujet et révélait le meilleur de mon essence. (...)
Comment prendre ce paramètre en compte ?' ' Il y a un moyen de le prendre en compte. Et de simultanément refaire le point complet sur tavie, tes sentiments, ton histoire, tes souvenirs. Ainsi que d'acquérir la possibilité unique de pouvoir, si tu le désires, modifier le cours de vos vies...' ' La Marelle ' fis-je. (...)
Comment vous l'exprimer...Oui, La Marelle n'entravait nullement mes perceptions mais accaparait toutes mes sensations. Alors qu'un drame se jouait devant mes yeux, mon esprit était focalisé sur mavie. Je la revoyais plus que je m'en souvenais, mais je la ressentais plus que je la revivais. Plus intensément. Heureusement, cela fut agréable, puisque j'eus une enfance et uneviefinalement très heureuses. Jusqu'au moment où je ressentis avec un décalage de plusieurs heures la peine de la mort aussi brutale que surnaturelle de mon amie l'Orque (au nom lui aussi imprononçable mais jamais oublié) et la culpabilité de ne pas les avoir informés d'une telle éventualité. (...)
Aujourd'hui encore je ne lui ai rien dit, et n'ai toléré aucune question sur le sujet. Je suis sorti des eaux, et ai commencé une nouvellevie, condamnant celle-ci à l'oubli, essayant d'empêcher les mauvaises pensées d'émerger... Qu'avait Elle ressenti ? Abandonnée saviedurant ? Qu'avait-elle fait le matin dans le lagon de Kiane ? Avait-Elle compris ce qui s'était passé ? (...)
Même, s'il ne faut pas, si l'Amour est trop souvent mémoire. Comme s'il était éphémère. Mais je donnerai maviepour la grâce de l'oubli. La solution est simple...Mais je ne suis pas de cette trempe là. La mort, le pacte, vous vous souvenez ? (...)
Lorsque l'on n'a plus rien, lorsque l'on croit avoir tout perdu, on ne se rend pas compte qu'il nous reste l'essentiel. Lavie, elle, le sait depuis des âges, et c'est le bon vieux instinct de survie animal qui me sauva ce jour là. (...)