Annexe : Les chapitres manquants des Aventures d'Arthur
Gordon Pymsur Les Editions sans Détour au format
Contient : créatures (10)(...) Cellesci atteignaient au mieux les sept mètres de long, et ne contenaient que trois silhouettes : deux rameurs et une troisième personne debout à l'avant. Lescréaturesdebout dans ces canots semblaient être des sortes de chamans ou de sorciers : ils émettaient un ululement presque continu et tout à fait différent des sons courts et discordants que nous avions entendu sur l'île de Tsalal, bien que régulièrement ponctué du familier Tekelili. (...)
Peters et moimême décidâmes alors à voix basse de rester dissimulés, et c'est seulement lorsque leurs armes furent convenablement réparties entre eux que les écoeurantescréaturessortirent les Européens hors des canots. Ces derniers avaient été ligotés comme du gibier : les pieds et les poings liés à une perche, afin d'être transportés à travers les broussailles cendreuses. (...)
Nous les suivîmes, satisfaits que les plantes suintantes ne trahissent pas notre déplacement comme une véritable forêt aurait pu le faire. Nous nous mouvions en suivant une trajectoire parallèle à celle descréatures, le son de notre passage complètement masqué par le rugissement de la cataracte. Enfin, la procession stoppa devant un édifice de pierres. (...)
Si nous suivions les sauvages de trop près, nous serions inévitablement massacrés par ces guerriers armés. Mais nous ne pouvions cependant pas rester là à attendre tandis que cescréaturesmaléfiques sacrifiaient nos frères humains à quelque divinité obscène. Nous nous rapprochions furtivement de l'entrée de l'édifice lorsque nous entendîmes soudainement un Tekelili perçant, répété une douzaine de fois par un écho provenant de l'intérieur du monument, à ce qui ne pouvait être qu'une impressionnante distance. (...)
Nous perçûmes un bruit de course rapide se précipitant vers nous, et nous eûmes juste le temps de nous dissimuler parmi les plantes rabougries avant que lescréaturesne surgissent hors de la porte voûtée à une vitesse infernale. Il n'y avait aucun signe de leurs prisonniers, mais les guerriers, visiblement plus entraînés à la course que les chamans, se précipitaient en une folle débandade de formes sombres fuyant aveuglément vers les embarcations. (...)
Je me remémorais les mythes propres aux grands monuments de l'antiquité, tandis qu'un sentiment vertigineux d'ancienneté nous enveloppait telle la poussière dégringolant de ruines. Une portion étroite du sol semblait particulièrement usée, probablement sous les pas descréaturesde Tsalal, étant donné que nous n'avions observé aucune trace de vie animale ou humaine sur l'îlot. (...)
Tous les corps étaient allongés sur une large dalle de pierre inclinée; peutêtre quelque autel sacrilège des Choses Polaires, d'une conception si épouvantable qu'elle ne pouvait convenir qu'à cescréatures. Tout comme de nombreux sols et parois de cette tour abandonnée de Dieu, l'autel était gravé d'étranges schémas et dessins que ni Peters ni moimême ne parvenions à comprendre. (...)
La lampe s'écrasa sur le sol du tunnel, ne laissant qu'une tache incandescente qui disparut immédiatement au loin, ne provoquant aucun dégât sur lescréaturesqui nous pourchassaient. La peur nous pétrifiait. Le premier, DeLance recouvrit ses esprits et nous hurla que nous devions lancer deux ou trois lanternes d'un même élan, dans l'espoir d'augmenter nos chances d'atteindre lescréatures. Nous fûmes tous immédiatement convaincus par la justesse de cette stratégie. J'aidais alors Peters à activer les lampes, conscient que l'affreuse sensation de succion qu'elles provoquaient n'était rien comparée aux horreurs qui nous guettaient si nous étions capturés et ramenés à la cité polaire. (...)
Par bonheur, deux des trois projectiles atteignirent la plateforme des Choses Polaires. Comme auparavant, le liquide qui s'échappa des débris de verre se précipita sur lescréatures, sa teinte verte putride se muant à leur contact en un rouge non moins écoeurant. Les Choses s'agitèrent frénétiquement, essayant de se soustraire au fluide mais ne parvenant qu'à le répandre tout autour d'elles, décuplant ainsi les effets corrosifs de la substance délétère. (...)Voici les 14 pages des chapitres manquants des aventures de Gordon Pym : 22 mars - Les ténèbres s'étaient sensiblement épaissies et n'étaient plus tempérées que par la clarté des eaux, réfléchissant le rideau blanc tendu devant nous. Une foule d'oiseaux gigantesques, d'un blanc livide, s'envolaient incessamment de derrière le singulier voile, et leur cri était le sempiternel Tekelili ! qu'ils poussaient en s'enfuyant devant nous. Sur ces entrefaites, NuNu remua un peu dans le fond du bateau ...