Sarah de Lindt
sur Eric Christ au format (160 Ko)
Contient : froid (11)(...) Et puis essaie de comprendre que Dieu, dans sa plénitude, est aussi le lieu, ou le non-lieu, où les opposés se confondent, non? - Les opposés? - Oui, nous ressentons le chaud et lefroid, la lumière et l'obscurité, et toutes ces choses qui sont le contraire l'une de l'autre. Tantôt lefroidnous déplaît, et il nous semble mauvais par rapport à la chaleur, mais tantôt c'est la trop grande chaleur, et nous désirons la fraîcheur. C'est nous qui, devant les opposés, croyons, selon notre caprice, selon notre passion, que l'un d'eux serait le bien et l'autre le mal. (...)
Dimanche 18 décembre 1996. Il pleuvait. Une pluie froide de décembre qui vous pénétrait jusque dans les os. J'avaisfroid. Merde. Superfroid. Je marchais depuis plusieurs heures dans les rues, ne voulant pas rentrer si tôt. J'avais retrouvé un job dans un club. (...)
J'avais un bonnet, un manteau dépenaillé, un jean troué et des collants de laine en dessous et j'avais encorefroid! Putain de pays de merde! La neige devait atteindre la vingtaine de centimètres maintenant et les voitures étaient bloquées. (...)
Ses yeux étaient soulignés de poches noires et ses traits étaient cachés dans la semi-pénombre, ne laissant ressortir qu'une impression de relief très marqué sur un visage tout en os. Il dégageait une sorte defroiddésagréable qui faisait peur. Je me suis avancée tout de même et je sentis ma colonne vertébrale être parcouru de frisson et de courants électriques. (...)
Alors, il prononça chaque mot avec tout le pouvoir qu'il pouvait rassembler dans ses paroles, et Dieu savait qu'il en avait: 'Je peux t'aider si tu veux, mais le prix sera haut'. Sarah resserra son manteau autour de son cou pour garder lefroidà distance. Peine perdue. Il devait faire au moins -10°C. La neige envahissait les rues tant et si bien que les voitures ne circulaient plus, à New York! (...)
Loin, loin de tout ça, de toute cette merde. Elle tomba d'épuisement. Quand elle se réveilla, elle prit conscience qu'elle avait trèsfroid. Elle ne savait pas combien de temps elle était restée prostrée là, incapable de bouger, noyée dans son désespoir. (...)
Sarah, debout, emplie d'une énergie nouvelle qui lui réchauffait le corps et s'étendait dans chaque membre, chaque partie de son être, ouvrit les yeux pour la voir : Il n'y avait que les flocons qui tombaient lentement en voltigeant dans la ruelle vide. Personne. Elle était seule. Sarah resta là un moment, sentant de nouveau unfroidl'envahir lentement et sourit devant ce qu'elle voyait en pensée ou pensait en voyant. Alors elle rentra chez elle. (...)
Se retournant vers le clochard, toujours les yeux fermés, toujours fredonnant, elle se remet au travail et soigne son pied meurtri par les gelures dues aufroid. La sonnerie retentit à la porte d'entrée de l'appartement. Sarah attends nerveusement. Cela fait deux mois qu'elle n'a pas vu les autres, ceux avec qui elle a vécu son Eveil. Son refus d'entrer dans la Fondation Melchior avait jeté unfroidentre elle et ses compagnons d'infortune. Sa présence sur le seuil de l'appartement d'Arthur lui fait ressentir une certaine humiliation. (...)Héritière de l'empire Lindt & Sprügli, Sarah a grandi dans une ambiance de conformisme rigide. Belle, intelligente, on lui destinait tout - la tête de l'entreprise, les honneurs, l'attention - sauf une chose, l'amour. Sarah reporta tout le sien vers sa petite soeur, Emma, qu'elle adorait et qui lui ressemblait tant. Le 25 décembre 1992, à 23h34, il neigeait quand la limousine noire où était la famille De Lindt dérapa sur la neige du pont et bascula par dessus la rampe de sécurité, plongeant dans ...