Ciel et Terre
sur Chaodisiaque au format
Le maître du vent. Je m'appelle Ciel Noir. Je ne suis qu'un homme. Le sang qui coule dans mes veines n'est pas celui des dieux, ni celui des dragons, il me permet juste d'animer ce corps, de pousser cette charrue qui creuse son sillon pour m'offrir de quoi me faire vivre, de parler, et parfois, faire naître un sourire sur le visage de ma femme. Ce village est petit, si petit qu'il ne porte pas de nom, à peine une centaine de paysans l'animent, survivant avec moi, leurs âmes revêtues ...Contient : rêve (12), rêvé, cochon(...) Les morts s'étaient offensés et avaient fait un exemple. - Un homme... Il ne sait pas encore ce que ça signifie ! - Ilrêvede justice... Ciel Noir, comme tout le monde à son âge. Moi, Boeuf, Pigeon Fou et trois de ces plus vieux fils avions retrouvé le caravanier : Il a fini comme Chêne et sa famille, accroché à un arbre esseulé, ses biens furent partagés entre les anciens et leurs familles. (...)
La route est plus facile à parcourir, aussi à notre rythme, nous avançons rapidement, comme aspiré dans unrêveétrange, dans un de ces cauchemars qui ne veut pas dire son nom et qui vous laissent un goût d'inquiétude toute la journée du lendemain. (...)
Entre les cahots de la yourte, la chaleur, le confort et ma fatigue, il ne me faut pas longtemps pour m'endormir. Dans mon sommeil, jerêvedu village : plus d'une fois, je revois Boeuf Assoiffé lentement grillé dans l'étreinte mortelle de la Princesse Bleue, le sourire de mon fils, Aube Grise me tend les bras, je l'enlace, et je brûle à mon tour. (...)
Je ne me sens pas observé, mais cela ne veut pas dire grand-chose. J'ai l'impression d'être prisonnier d'unrêveétrange. Les buissons blancs semblent presque me narguer, je ne les touche pas. Finalement, je tente de repérer un endroit ou la glace a complètement recouvert la faille. (...)
Je prends une inspiration, et je franchis le seuil en espérant que cela ne soit que de la lumière. La demeure de Lewellyn ressemble à unrêved'enfant. Tout l'endroit semble avoir été bâti dans la glace et saupoudré de neige, pourtant il y fait bon, l'endroit est chaud, confortable, la neige ne fond ni ne colle, mais elle est moelleuse et amortit tous les angles durs de sa demeure. (...)
Ce n'est rien, crois-moi, d'où je viens, certains de mon peuple commande à des univers entiers ! J'essaye d'imaginer. En vain. - Tu as construit cela seul ? - Oui, invoqué à partir derêvede noblesse, de froid, et de jeux de neige infantile, cela parait impossible, mais pendant huit siècle, on a du temps a tuer, crois-moi ! (...)
Tout à coup, je me sens décontenancé. - Je ne crois pas que je le pourrais. - Allons, tu n'as jamaisrêvéun jour de crever un oeil à ta femme, ou au moins de lui donner une gifle ou un coup de poing ? (...)
Ma chambre est une pièce de glace bleue, et mon lit un bain de neige moelleuse et tendre comme du duvet d'oie et tiède comme le sein d'une femme. Malgré la nervosité, je m'y endors comme un enfant. Jerêvede froid, de vent hurleur, de douleur et de choses réelles. A mon réveil, la faim est là, en embuscade. (...)
Parfois, je cours dans des couloirs sans fin, en ligne droite, pour découvrir la porte de ma chambre devant moi, ou au pire, à quelques mètres derrière moi à peine. Parfois Aewyll traverse ma pensée, lame derêvechauffée à blanc traversant mon esprit engraissé de songe. Cette créature est tout ce que je peux rêver, mais sa présence m'est douloureuse comme un tison dans mes entrailles. (...)
Après un moment, je réalise qu'il me faut plutôt peut-être faire quelque chose. Cet endroit est comme unrêveéveillé, et parfois l'important dans unrêven'est pas tant où l'on va, mais ce que l'on fait, comme une histoire que l'on est en train de réécrire soi-même. Je rouvre brutalement les yeux lorsque je me rends compte que la salle des vents chante, mais que je n'écoute pas ce que les voix disent. (...)
- Pourquoi suis-je nu et pas toi ? Ma voix sonne comme celle d'un adolescent frustré. - C'est mon pouvoir, dit-elle, monrêve, et il me supporte autant que je le supporte, toi, tu portes les rêves d'élégance d'autrui, des rêves de mortels, mais les rêves ne survivent pas longtemps dans ce monde. (...)
Mais le monde est incapable de rompre le souvenir de notre séparation, au contraire, alors que les kilomètres s'ajoute les uns aux autres, la nuit, sinistre comme une auge à cochons après la visite d'une bande de loups affamé ne fait que rendre les souvenirs d'Aewyll plus vivaces. La faim et le froid ont beau me saisir, cet instant d'étrange intimité me pousse en avant comme lerêvefiévreux d'un dément amoureux. La cape de la Princesse Bleue, qui me sert d'unique vêtement, flotte sous l'effet du vent qui pousse un hurlement sans fin que je me surprends à apprécier. (...)
C'est pour ça qu'il a détruit le village, il avait vu sa mort... Le destin... d'abord, je pense au tour decochonqu'il nous a tous joué, mais Brume tombe à genoux, et m'assène la vérité. Je ne comprends pas tout de suite ce qu'elle dit, puis la vérité s'élève dans la salle comme dans mon esprit, comme une nuit noire issue de sa bouche, recouvrant mes pensées, me plongeant dans une obscurité intérieure assourdissante. (...)