Cil
sur La Page à Papat
Cette nouvelle de Cugel L'Astucieux, intitulée CIL, se situe aprés le chapitre , 'Le monde Supèrieur'. Lugubre et languissante, la nuit s'avançait sur les terres en friche du septentrion comme le sang qui s'écoule d'un animal à l'agonie. Le crépuscule surprit Cugel alors qu'il traversait péniblement un marais salant. Dans la sombre lumière rouge de l'aprês-midi, il s'était égaré, il avait d'abord gravi une pente douce, puis rencontré un sol humide avant de s'enfoncer dans un terrain spongieux ...Contient : porte (12), parole (2)(...) Cugel escalada avec difficulté quelques pierres qui s'effritaient sous son poids, dégaina son épée et s'engouffra dans la brêche où jadis se trouvait laporte. A l'intérieur, régnait un silence total ainsi qu'une odeur de poussière et de pierre moisie. Cugel tomba à genoux et vit se découper sur le ciel trois silhouettes grotesques qui s'arrêtèrent près des ruines. (...)
Le fantôme s'était évanoui, combien de temps Cugel avait-il dormi ? II regarda par l'embrasure de laportele ciel d'orient teinté de lueurs annonçant l'aube prochaine. Après une attente interminable, le soleil darda un premier rayon flamboyant qui pénétra jusqu'au fond de la salle. (...)
S'il rendait l'amulette, Slaye de toute évidence le trahirait ou dans ie meilleur cas manquerait à saparole- réalisant ainsi la malédiction. D'autre part, si Cugel conservait l'amulette, il n'en perdrait pas moins son voeu le plus cher - ce qui réaliserait la malédiction - mais l'amulette lui resterait. (...)
Mais, jettant un coup d'oeil par-dessus son épaule, il crut distinguer une haute silhouette immobile au milieu des piédestaux. Cugel, dès lors, abandonna tout autre projet pour s'avancer d'un pas rapide jusqu'à la grandeporte: en se présentant avec humilité, il pourrait échapper à l'attention de Derwe Coreme. Un bruit furtif monta des marches. Cugel cogna le marteau contre laporteavec insistance. Le son résonna à l'intérieur du palais. Une minute s'écoula et Cugel crut percevoir de nouveaux bruits derière lui. (...)
- Je préférerais de beaucoup en parler à l'intérieur, car la créature s'approche pas à pas de la terrasse. Le judas se referma. Cugel observa laporteblanche. Il cogna le marteau tout en scrutant les ténèbres. Le portail s'ouvrit dans un grincement et un craquement. (...)
Un petit homme trapu en uniforme pourpre s'avança vers lui. - Entrez vite ! Cugel se glissa promptement à l'intérieur. Le valet de pied referma aussitôt laportequ'il verrouilla de trois chevilles métalliques. Alors même qu'il fermait, on entendit un craquement et une pression se fit sentir sur laporte. Le valet de pied donna un petit coup de poing sur laporte. - J'ai encore refoulé la créature, dit-il avec satisfaction. Si j'avais été moins rapide, elle vous sautait dessus, ce qui nous aurait tous deux beaucoup contrariés. (...)
Ils s'arrêtèrent en haut des marches, pour scruter d'un oeil sceptique la promenade d'où monta un bruit des plus atroces. Cugel jeta un coup d'oeil par-dessus son épaule et vit Derwe Coreme, dans l'embrasure de laporte, qui observait la scène avec une attention soutenue. - En avant ! cria-t-il. Cernez cette misérable créature. (...)
Cugel le taillada de son épée, courut se réfugier derrière un autre piédestal, puis s'élança ventre à terre et avec une grande agilité en direction de la terrasse. Déjà, laportese refermait. Cugel se jeta dans l'étroite ouverture. Claquant laporte, il ferma les verrous. La goule s'écrasa de tout son poids contre les planches, et les verrous émirent un crissement de protestation. (...)
Slaye se tenait en retrait, un sourire de triomphe sur les lèvres. - Maintenant, vous et la fille, disparaissez. Je n'ai qu'uneparolemais vous n'aurez rien de plus. Vous conservez vos misérables existences : partez. - Accordez-moi une faveur ! (...)
Slaye était campé sur ses jambes écartées, épaules voûtées et tête penchée en avant. Il suivait du regard les moindres gestes de Cugel. Ce dernier déverrouilla laporte, l'ouvrit et s'avança sur la terrasse. Le silence régnait le long de la promenade. Cugel mena Derwe Coreme au bas des escaliers, puis sur le côté, dans la luxuriante végétation de l'ancien jardin. (...)